Adresse aux républicains dédiée à la Montagne

Auteur(s)

Année de composition

1793

Genre poétique

Description

Alexandrins en rimes plates

Texte

Quoi les mains du Français à peine déchaînées
À l'esclavage encor sont-elles condamnées ?
Ce fier républicain défiant tous les rois
Des tyrans qu'il combat recevrait-il des loix ?
Nos soldats citoyens dédaignant la victoire,
Quitteraient lâchement le sentier de la gloire !
Nos drapeaux orneraient la pompe d'un vainqueur !
On verrait le Français insensible à l'honneur !
Ah ! Périsse plutôt la République entière
Que de nous voir jamais courber la tête altière
Sous la main des tyrans et fléchir le genou
Devant des fers honteux qu'ils préparent pour nous.
Ô toi qui des Français règles les destinées,
Toi ! Effroi des tyrans enflamme nos armées,
Au camp des ennemis guide nos étendards,
Qu'au cri de Liberté leurs bataillons épars
S'entrechoquent, tombent ; qu'une terreur profonde
S'empare de leurs chefs, de ces fléaux du monde.
Périsse le dernier despote assassin
Qui pour régner en paix égorge les humains
Qui seuls avés guidé pour perdre ma patrie,
Les parricides mains de monstres en furie,
Contre nos défenseurs Marat Le Pelletier
Bourdon le Montagnard et l'immortel Chalier.
Tremblés le Français né pour délivrer la terre
Jure à ses oppresseurs une éternelle guerre
Et votre sang coulant en expiation
Va de crimes affreux venger ma nation.
Et vous nobles de nom, lâches par caractère
Qui voulés déchirer le sein de votre mère,
Qui mettés vos fureurs au nombre des vertus,
Tremblés, nos bras vengeurs trop longtems suspendus
Vont tomber à la fois sur vos têtes parjures
Et punir des forfaits dont frémit la Nature.
Et vous de l'Évangile apôtres imposteurs
Des décrets du Très haut hardis promulgateurs
Qui prêchés des vertus et bénissés les crimes,
Qui guidés le poignard au sein de vos victimes,
Le voile est déchiré le peuple ami des loix
Abjure son erreur et recouvre ses droits.
Le sang coula par vous féroces fanatiques
Tout le vôtre versé sauve la République.
Aux armes citoyens devenons tous soldats,
Que partout la terreur accompagne nos pas,
Mourons tous en héros ou sauvons la patrie,
Attaquons dans ses murs la fière Germanie,
Dans son propre palais frappons cet empereur
Qui dans Paris fumant voulait entrer vainqueur,
Renversons ce Brunswik l'insolent Dom Quichotte,
Des brigands couronnés de ces roys à calotte,
Dans leurs faibles châteaux orgueilleux potentats,
Esclaves à la Cour tyrans dans leurs États.
Marchons vers Albion, dans ses villes fumantes,
Effaçons les revers de ces guerres sanglantes
Que le féroce Pitt oubliant tous les droits
Soudoya dans nos murs pour la cause des roys.
Dans ses forts élevés osons braver l'Espagne
Méprisons des soldats qu'un faux zèle accompagne,
Frappons le fier despote enlevons ses trésors
Et que Rome à son tour succombe à nos efforts.
Vous peuples nés sujets, du couchant à l'aurore,
Osés briser vos fers il en est tems encore,
Renversés vos tyrans nos communs ennemis
Osés nous imiter et devenons amis.
Rendus à la raison et à la vérité
Les hommes crieront tous vive la Liberté.
Du thrône et de l'autel courageux destructeurs
Des droits sacrés de l'homme immortels fondateurs,
Augustes montagnards, pères de la patrie,
Bravés des assassins les efforts, la furie
Portés les derniers coups à ces monstres divers
Qui du peuple français voulaient river les fers.
Nos ennemis vaincus, rappellés la concorde,
Et fermés pour jamais l'antre de la discorde.
Montagnards, des Français du reste des humains,
À vous seuls il est dû de fixer les destins,
Faites chérir vos loix, et d'un accord civique,
L'univers chantera vive la République.

 
 

Sources

AN, F17 1008C.