Chant du 14 juillet 1800

Auteur(s)

Année de composition

1800

Genre poétique

Description

Paratexte

Exécuté dans le temple de Mars le 25 messidor an VIII

Texte

Musique de Méhul

Ô glorieuse destinée !
Applaudis-toi, peuple français !
Bientôt, de palmes couronnée,
La victoire obtiendra la paix.
Le front des Alpes s'humilie ;
Nous avons franchi leurs frimas ;
Et tous les forts de l'Italie
S'ouvrent deux fois à nos soldats.

Où sont ces ennemis qui, dans Nice et dans Gènes,
Avaient osé dicter leurs, ordres absolus ?
Leur sang du Milanez rougit au loin les plaines :
Un héros se présente ; ils ne sont déjà plus.

Des Germains l'aigle épouvantée
Dans Vienne revole à grands cris,
Et, sur sa route ensanglantée,
Ne voit partout que des débris.
À cette nouvelle fatale
La cour des Césars est en deuil ;
Et, de la Tamise, rivale,
Nos succès confondent l'orgueil.

Mais quel bruit inconnu fait trembler ces portiques ?
Des fantômes brillants, des mânes glorieux,
Au bruit de nos concerts sous ces dômes antiques
Descendent lentement de la voûte des cieux.

Ô Condé ! Dugommier, Turenne !
C'est vous que j'entends, que je vois
Vous cherchez le grand capitaine
Qui surpassa tous vos exploits ?

Les fils sont plus grands que les pères
Et vos cœurs n'en sont point jaloux.
La France, après tant de misères,
Renaît plus digne encore de vous.

Tu meurs, brave Desaix ! Tu meurs ! Ah ! Peux-tu croire
Que l'éclat de ton nom s'éteigne avec tes jours ?
L'Arabe en ses déserts s'entretient de ta gloire ;
Et ses fils à leurs fils la rediront toujours.

Français, sur le tombeau d'un héros magnanime
Ah, jurons nos partis, nos haines, nos fureurs !
Qu'un même enthousiasme à son nom nous anime !
La concorde aujourd'hui doit unir tous les cœurs.

Toi qu'on a tant déshonorée
Liberté, calme tes douleurs ;
De ta couronne déchirée
Le sang ternissoit les couleurs ;

Mais enfin dans ce jour de fête,
La clémence adoucit tes traits,
Et ses mains orneront ta tête
De fleurs qui brillent à jamais !

Un grand siècle finit, un grand siècle commence :
Gloire, vertus, beaux-arts, renaissez avec lui !
Ô Dieu ! Vois à tes pieds tomber ce peuple immense ;
Les vainqueurs de l'Europe implorent ton appui.

Être immortel ! Qu'à ta lumière
La France marche désormais,
Et joigne à la vertu guerrière
Toutes les vertus de la paix !