Un fichu cachoit ce qu'on cache,
Ce qu'on cache, ou qu'il faut cacher ;
Une épingle servait d'attache,
Et punissoit quiconque en osait approcher.
Main espiègle, bouche hardie,
Doigts fripons et pleins de folie,
Dès que chair, tant soit peu, dérangeoit le fichu ;
L'on voyoit du sang répandu.
Le plus léger larcin coûtoit une piqûre.
Il n'est pas de volupté pure ;
Toujours peine, en ce monde, accompagne plaisir ;
Jamais de gaîté sans soupir.
Sous le discret fichu, l'œil ardent du bel âge
En vain tachoit aussi de s'ouvrir un passage ;
En vain mille regards rivaux
Mollement erroient à toute heure,
Autour des deux globes jumeaux,
Habitans de cette demeure :
Jamais fichu plus inhumain,
N'avoit couvert un joli sein :
Toujours l'indigne gaze étoit impénétrable ;
Toujours d'épais replis arrêtoient l'œil coupable ;
Rien de mâle, en un mot, ne pouvoit s'y glisser,
Pudeur ! Le beau sans voile a-t-il de quoi blesser ?
Si, pour être admiré du sage,
Nature a tout fait ici bas ;
Ce que nous y couvrons est-il moins son ouvrage,
Que ce que nous n'y couvrons pas ?
L'impitoyable gaze et l'épingle sévère,
Ainsi gardoient au mieux ce qu'on ne garde guère ;
Mais un tyran perfide, hélas ! c'étoit l'Amoue,
Jaloux de leur triomphe et blessé de leur gloire,
Vint les désunir sans retour.
Plus d'union, partant plus de victoire :
Dame épingle soudain sentit fuir sa valeur ;
Sire fichu, pour lui, ne songea qu'à se rendre.
L'Amour demeura le vainqueur ;
L'Amour prit ce qu'il voulût prendre.

Ainsi, jaloux de vos vertus,
François, mille tyrans vous tendent mainte amorce ;
Soyez toujours unis, pour n'être point vaincus :
C'est l'union qui fait la force.