Chant pour la fête de la Vieillesse
Auteur(s)
Paratexte
Exécuté à la fête du 10 fructidor an IV
Texte
Musique de Gossec
Déjà le génie et la gloire,
Guidant au loin nos étendards,
Ont couronné par la victoire
Le fer béni par nos vieillards.
Hommage à l'auguste vieillesse !
À la saison de la sagesse
Offrons nos solennels accords !
Français, pour célébrer cet âge,
De la paix consolant présage,
Vertumne étale ses trésors.
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)
Que la jeunesse plus docile
Respecte le déclin des ans :
La vieillesse est encor fertile,
Et jouit des fruits du printemps.
Tel qu'un arbre cher à Pomone,
Qui forme sa riche couronne
Des tribus de chaque saison,
Le vieillard,vainqueur de l'envie,
De tous les travaux de sa vie
Recueille une illustre moisson.
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)
Dans sa vieillesse quels hommages
Obtient un appui de l'État !
Riche du commerce des sages,
Il brille d'un nouvel éclat;
Témoin fidèle, irréprochable,
Tel qu'un monument vénérable,
Par son siècle il est consulté ;
Près de lui veillent la prudence,
La froide et sûre expérience,
Et l'incorruptible équité.
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)
Contemplez ce fécond Voltaire,
Dont le matin fut si pompeux ;
Est-ce en commençant sa carrière
Qu'il éblouit le plus les yeux ?
Ou quand, sur un noble théâtre,
Il reçut d'un peuple idolâtre
Le prix de ses nombreux travaux ?
Et lorsqu'au temple de mémoire,
Courbé sous soixante ans de gloire,
Il triomphe de cent rivaux ?
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)
Oh ! Quel pouvoir un front de neige
Ajoute aux vertus, aux talents !
Malheur à la main sacrilège
Qui souilleroit ces cheveux blancs !…
Si cet imposant caractère
Ne peut désarmer ta colère,
Que tes jours languissent flétris :
Et puisses-tu pour ta bassesse,
Dans l'opprobre de ta vieillesse,
Servir de risée à tes fils.
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)
Que l'aimable et frivole Athènes
Néglige ces pieux tributs ;
Sparte, honneur de la race humaine,
Les place au rang de ses vertus :
Ô Sparte ! Aux pompes de la Grèce,
Jouet d'une folle jeunesse,
Un vieillard osa t'invoquer ;
Et l'on redit ce mot auguste,
Athènes connoît mieux le juste,
Sparte le sait mieux pratiquer.
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)
C'est par là que de sa patrie,
Numa raffermissant les droits,
De sa fabuleuse Égérie
Fit respecter les saintes lois ;
C'est par là que Rome plus libre,
Devant la majesté du Tibre,
Abaissa le trident des mers ;
Et que dans sa vaste carrière,
Rival du Dieu de la lumière,
Son aigle envahit l'univers.
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)
Sans la piété filiale,
Tombent les plus fermes remparts :
Où vit-on régner la morale,
Sans le respect pour les vieillards ?
Lien sacré de tous les êtres,
Il nous unit à nos ancêtres ;
Il agrandit le genre humain :
C'est l'anneau puissant et magique
De cette chaîne allégorique
Que Jupiter tient dans sa main.
Dans nos concerts et dans nos fêtes
Que nos pères soient révérés !
Quand l'âge aura blanchi nos têtes,
Comme eux nous serons honorés ! (bis)