Départ du proscrit, exilé de Paris par la loi du 27 germinal (Le)
Auteur(s)
Mots-clés
Musique
Paratexte
Romance
Texte
Recevez mes derniers adieux,
Tendre amitié, plaisir volage !
Et vous, Muses, filles des cieux !
Recevez mon dernier hommage.
Je cultivais pour les amours,
Les fleurs que vous faites éclore ;
Mais loin d'eux et sans leur secours,
En pourrais-je cueillir encore ?
Sans regret je fuis les beaux lieux,
Où j'ai vu périr l'innocence ;
J'irai sur les bords plus heureux,
Où l'on prit soin de mon enfance ;
Mais j'y porterai mes douleurs,
Ils seront pour moi sans verdure ;
Et ce n'est qu'à travers les pleurs,
Que mes yeux verront la Nature.
Chantre harmonieux des beaux jours !
Je n'entendrai plus ton ramage ;
Bosquet planté pour les amours !
Je n'irai plus sous ton ombrage :
Près d'un ramier, sous un cyprès,
J'irai pleurer ma tendre mère,
Et regretter quelques bienfaits,
Qu'on m'ôte le pouvoir de faire.
Que n'ai-je reçu du destin
Au lieu d'épée une houlette,
Et que ne suis-je le Colin
D'une simple et tendre Lisette !
Pour tenir le jour d'un pasteur,
L'on ne me dirait pas coupable,
Et sur les seuls défauts du cœur,
L'amour serait inexorable.
Des beaux ans et des doux désirs
Le feu s'éteint dans la tristesse,
Et s'il m'échappe des soupirs,
Ils ne sont plus pour ma maîtresse ;
Mais dans un cœur qui sut aimer,
Je le sens malgré ma souffrance,
Il ne faut pour le rallumer,
Qu'une étincelle d'espérance.