Duel entre un royaliste et un républicain
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Paratexte
Texte
Un républicain disputoit
Hier avec un royaliste,
Et celui-ci lui répétoit :
Tais-toi, tu n'es qu'un anarchiste ;
Tu fis périr notre bon roi
Pour ta chienne de République :
Mais je ris bien quand je te vois
Encor plus détesté que moi
Des chefs de ta maudite clique ;
Va, l'un par l'autre, quelque jour
Chefs et goujats auront leur tour.
De ce trait machiavélique
Le républicain irrité,
Donne au royaliste effronté
Un soufflet vraiment anarchique,
À-compte sur la royauté.
On sait combien un soufflet pique ;
On sait comment on y réplique,
Je sors, coquin, tu me suiveras.
– Coquin toi-même ? Où tu voudras :
Au bois de Boulogne ils se rendent.
Dieu sait si le long du chemin
En injures ils se répandent.
Vous les voyez le fer en main,
L'œil en feu, l'écume à la bouche,
Et dès la première escarmouche
Leurs traits n'offrent plus rien d'humain.
D'abord ils féraillent envain ;
Ils s'attaquent, ils se défendent ;
Le combat demeure incertain,
Ce n'est pas là ce qu'ils demandent.
Un accès de rage les prend :
Ils se relèvent, se refendent,
Et du même coup en jurant,
Sur le carreau tous deux s'étendent.
Tant mieux ! s'écria Jean Bétrant,
Tant mieux ! Tous ces gueux-là s'entendent.