Français libre à l'Être suprême (Le)
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Mots-clés
Paratexte
Prière républicaine universelle
Texte
Grand Dieu, père commun et bienfaiteur des hommes
Toi qui créas les cieux, et le monde où nous sommes
Dont tout prouve à nos yeux l'être et l'immensité,
Qu'on ne peut adorer que par la vérité ;
Du midi jusqu'au Nord, du couchant à l'aurore,
Est-il un culte vrai, qui te plaise et t'honore ?
Est-ce celui du juif, du bonze ou de l'iman ?
Est-ce le catholique, ou le mahométan ?
Non, ces grossiers ramas d'erreurs et de mensonges,
Par l'homme imaginés, ne sont rien que des songes.
Tous ces cultes divers sont absurdes et faux ;
Tu les vois en pitié, tous ils te sont égaux ;
Pour l'homme tu n'as fait que la loi de Nature,
Dans nous elle est innée, elle est vraie, elle est sûre ;
Toi-même l'as gravé de tes divines mains,
En tous temps, en tous lieux, dans le cœur des humains
Elle n'a pas besoin de docteurs ni d'apôtres ;
Seule elle vient de toi, n'en adoptons point d'autres.
Dans cette nuit profonde où l'homme erre ici bas,
Pour guider notre esprit et diriger nos pas,
La Raison, flambeau pur, rayon de la lumière,
Sur le bien, sur le mal, nous instruit, nous éclaire.
T'adorer, nous chérir, aimer la vérité,
Bien servir sa patrie et la société,
Se conformer aux lois, être humain, équitable,
C'est la religion, la seule véritable.
Bien mieux qu'un culte absurde ou superstitieux,
Partout elle rend l'homme agréable à tes yeux.
Loin de toi, loin de nous ces imposteurs, ces êtres,
Charlatans effrontés qui, sous le nom de prêtres,
Se vantant de prêcher la vraie religion,
Ne prêchaient qu'imposture et superstition.
Ne pouvant concevoir la divine sagesse,
Ils l'ont mise au niveau de l'humaine faiblesse.
Ils t'ont osé donner nos mœurs, nos passions,
Nos vices, nos défauts, nos imperfections.
Ô crime ! Ils ont de toi fait un juge sévère,
Un Dieu vindicatif, injuste et sanguinaire ;
Enfin ils te peignaient, pour te rendre odieux,
Inconséquent, barbare, intolérant comme eux.
Venge-nous, venge-toi de ces cœurs sacrilèges
Qui, sous ton nom sacré, nous ont dressé des pièges ;
Qui, trompant l'ignorance et la crédulité,
Se disaient confidens de la Divinité.
Ils t'ont méconnu tous et t'ont fait méconnaître ;
Mais du sein de l'erreur la vérité va naître.
Démasqués, confondus, ces vils ambitieux,
Aujourd'hui, tels qu'ils sont, paraissent à nos yeux,
Avides de crédit, d'honneur et de richesse,
Vivant dans les plaisirs, le luxe et la mollesse,
Sans culte, sans vertus, sans principes, sans mœurs,
Hypocrites, ou sots, dans leurs discours menteurs,
Du peuple entretenant la stupide ignorance,
Ils cimentaient des rois la fatale puissance.
Ces monstres, ces tyrans, entre eux coalisés,
Forgeaient, rivaient les fers des peuples abusés.
Oui, dans tous les États, l'absurde fanatisme
Fut le meilleur soutien du cruel despotisme.
Votre règne est passé, fuyez, vils charlatans.
Puissent périr vos noms avec ceux des tyrans !
Puisse périr de vous jusqu'à votre mémoire !
Puisse la vérité, remportant la victoire,
Et la saine raison triomphant de l'erreur,
De la France assurer la gloire et le bonheur !
Toi qui nous affranchis d'un affreux esclavage,
Dieu juste, Dieu puissant, achève ton ouvrage !
Exauce ma prière et les vœux des Français ;
Que notre liberté soit durable à jamais !
Fais que les nations nous prenant pour modèles,
Contre tous les tyrans vengent notre querelle !
Protège notre cause, et rends-nous les vainqueurs
Des traîtres, des méchans et des conspirateurs !
Veille sur les destins de notre République ;
Conserve à nos soldats ce courage héroïque,
Qui les fait triompher de leurs fiers ennemis !
Que par la paix bientôt les peuples soient unis !
Inspire à nos enfans les mœurs républicaines ;
Donne-nous des vertus aussi pures que saines ;
À nos législateurs dicte de sages lois,
Surtout préserve-nous des prêtres et des rois !