Français prisonnier de guerre (Le)
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Texte
Air : Comment goûter quelque repos ?
Peut-on goûter quelque douceur
Au sein d'une terre étrangère ?
Un tendre enfant, loin de sa mère,
N'a d'autre bien que sa douleur.
Je sens dans mon âme attendrie
Tout le poids d'un si grand malheur.
Non, non, il n'est point de bonheur
Pour qui vit loin de sa patrie.
Je m'armai contre les tyrans,
Pour venger la cause commune :
Mais, ô revers de la fortune !
Je fus prisonnier à vingt ans.
Ils m'ont en vain laissé la vie ;
La mort n'a pas perdu ses droits ;
Je meurs chaque jour mille fois,
En vivant loin de ma patrie.
S'il est des fils assez pervers
Pour s'armer contre cette mère,
Ces monstres qui souillent la terre,
Sont en horreur à l'univers :
Poursuivis par une furie,
Le cœur déchiré de remords,
Partout ils souffrent mille morts ;
Nulle part, ils n'ont de patrie.
Objet de mes constants amours,
Dont j'ambitionnais la tendresse,
Jeune, belle et sage maîtresse,
Il n'est plus pour moi de beaux jours.
Loin de ton image chérie,
Je te renouvelle ma foi ;
Je t'aime cent fois plus que moi :
Mais j'aime encor plus ma patrie.
Que vois-je ? Un lâche corrupteur
Vient éprouver ma foi dans l'ombre ;
Dans son regard farouche et sombre,
Je vois les crimes de son cœur.
N'enchaîne plus ta barbarie ;
Est-il rien de sacré pour toi ?
Frappe, bourreau, mais apprends-moi
La liberté de ma patrie.