Air : Jupiter un jour en fureur

« Délaissé des ris & des jeux,
L'autre jour l'Amour hors d'haleine,
Aux Grâces, la chose est certaine,
Disait d'un air furieux !
Quoi, depuis quatre, ans je voyage !
Du globe entier j'ai fait le tour ;
Vous restiez là sans l'Amour ? (bis)
Mes Sœurs, ah ! quel outrage. (bis)

Je ne puis donc plus enflammer,
Ni le berger, ni la bergère !
Non, l'on ne songe plus à plaire,
Et l'on jouit sans aimer.
Tous les peuples dans la détresse,
Au lieu d'amour parlait d'impôts ;
Et ses rois & leurs suppôts (bis)
Ont banni la tendresse. (bis)

J'allais chez les femmes des grands,
Et je n'y vis que de l'audace ;
Près d'elles Plutus tient ma place,
Il m'a fait chasser par ses gens.
J'essayai de faire une brèche
Au cœur d'un duc & d'un baron ;
Mais leur croix & leur cordon (bis)
Ont émoussé ma flèche. (bis)

Moi, je veux au-delà des mers
Fonder un État sans noblesse,
Où la vertu soit la richesse,
Où l'Amour seul donne des fers.
Songez à suivre votre frère :
Entendez-vous ; voilà ma loi.
Oui, vous viendrez avec.moi, (bis)
Sans vous que puis-je faire ? » (bis)

Euphrosine disoit tout bas :
D'un mot on pourrait le confondre ;
Mais toutes sans daigner répondre
Prennent l'Amour dans leurs bras.
Et suivant les bords de la Seine,
À travers un peuple enchanté,
L'offrent à la Liberté, (bis)
Qu'elles nomment leur reine. (bis)

« Voici le petit Dieu des cœurs ;
Ici, Déesse fortunée,
Ce fera le dieu d'Hyménée ;
Nous l'enchaînerons de fleurs.
Il s'est ennuyé le volage ;
Que ne restait-il avec nous ?
Mais le voilà près de vous, (bis)
Et vous le rendrai sage. » (bis)

La Liberté voyant l'Amour,
D'un air ingénu le caresse ;
L'Amour reconnaît la Déesse,
Et lui sourit à son tour.
Aussitôt il lui fait hommage
De son carquois & de ses traits.
Ah ! Le frippon^[sic] désormais (bis)
En fera bon usage. (bis)