Hymne du 21 janvier

Auteur(s)

Année de composition

1796

Genre poétique

Description

Texte

Musique de Berton

Les flammes de l'Etna sur ses laves antiques
Ne cessent de verser des flots plus dévorants.
Des monstres couronnés les fureurs despotiques
Ne cessent d'ajouter aux forfaits des tyrans.

S'il en est qui veulent un maître,
De rois en rois dans l'univers
Qu'ils aillent mendier des fers,
Ces Français indignes de l'être !

Ô France ! La vois-tu cette horrible furie,
De ta reine barbare impitoyable sœur ?
La vois-tu, d'une main au carnage aguerrie,
Allumer le tonnerre à l'aigle ravisseur ?[1]

Lille ! Un Dieu vengera ta cendre et ton injure ;
Tes débris enflammés accuseront Louis.
La bombe, en t'écrasant, le déclarait parjure :
Thémis dut l'immoler à ses peuples trahis.

Rien n'absout les tyrans ; quand un roi fut rebelle,
Toujours la nation peut dicter son trépas.
La voix d'un peuple entier n'est jamais criminelle ;
Et nous le sommes tous, si Louis ne l'est pas.

Ô ! Que Vienne aux Français fit un présent funeste !
Toi, qui de la discorde allumas le flambeau,
Reine que nous donna la colère céleste,
Que la foudre n'a-t-elle embrasé ton berceau !

Combien ce coup heureux eût épargné de crimes !
Ivre de notre sang désastreuse beauté,
Femme horrible ! Tu meurs après tant de victimes.
Le glaive expie enfin ta lâche cruauté.

Et Philippe[2] vivait en dépit de la foudre,
Artisan insensé de crimes superflus !
Ton peuple, ton Sénat, ton Dieu vient de t'absoudre,
France ! La hache tombe, et Philippe n'est plus.

Sur leurs restes sanglans la monarchie expire.
Siècles de servitude, un jour brise vos fers !
Au sceptre usurpateur succède un juste empire.
République ! Tu nais pour venger l'univers.

Ah ! Pour être à jamais triomphante et paisible,
Donne au mérite seul les rangs et les emplois :
Mère d'enfans égaux, sois une, indivisible ;
Mais que ta Liberté soit esclave des lois !

L'orgueil au désespoir, la rage fanatique
Tenteront d'ébranler tes nouveaux fondemens
Pour vaincre de cent rois l'active politique,
C'est peu de tes amis, il te faut des amans.

Il te faut de ces cœurs dont la brûlante ivresse
Au-devant des périls s'empresse de courir ;
Et, fière de lancer ta foudre vengeresse,
Sois fidèle au serment de vaincre ou de mourir !

Oui ! De leur sang impur qu'ils rougissent la terre !
Qu'ils meurent sous le glaive, au bruit de nos succès,
Les traîtres qui, votant la famine et la guerre,
Brûlent d'anéantir jusqu'au nom des Français !

Oui, consacrons nos mains dans le sang des perfides
Pour venger son pays tout Français est soldat ;
Mais laissons aux tyrans les poignards homicides,
Et d'un peuple égorgé le vaste assassinat ![3]

Un roi de ces horreurs peut seul être capable.
Tel fut ce roi bourreau[4] qu'on nomme en frémissant;
Mais un peuple ! Sa loi doit punir le coupable,
Le frapper sans Thémis, c'est le rendre innocent.

  1. ^ L'aigle d'Autriche, Christine de Saxe mit le feu aux premières bombes qui foudroyaient Lille et Louis qui la faisait assiéger nous pressait de l'aller défendre.
  2. ^ Philippe d'Orléans.
  3. ^ L'exécrable St Barthélémi [sic].
  4. ^ Charles IX.