Hymne pour la fête des Époux, 10 floréal

Auteur(s)

Année de composition

1798

Genre poétique

Description

Alexandrins en rimes croisées

Texte

Musique de Méhul

Chœur des amants :

Dieu, qui créas nos cœurs, tu les as faits sensibles ;
Nous te devons l'amour, le plus doux des penchants,
Rends par le chaste hymen nos mœurs incorruptibles,
Notre bonheur plus pur, nos devoirs plus touchants.

Le chef du chœur :

Oui : Dieu s'est fait entendre ; et ses mains paternelles
Ont peuplé par l'amour, l'air, la terre et les eaux.
Il suspend dans nos bois le nid des tourterelles ;
Il enflamme la vigne, et l'unit aux ormeaux.

Venez, tendres amans : voici l'instant propice.
Le Ciel va par l'hymen consacrer vos ardeurs
C'est peu que votre nom, que votre main s'unisse,
Si vous ne confondez et vos vœux et vos cœurs.

Ils sont formés, vos nœuds. Que l'air brille et s'épure !
Fêtons, chantons l'hymen, et ses heureux époux.
Les époux sont sacrés aux yeux de la Nature ;
Fleurs, prodiguez pour eux vos parfums les plus doux !

Que toujours dans vos cœurs votre amour rajeunisse,
Goûtez son premier charme à votre dernier jour :
Tremblez de l'exposer aux atteintes du vice,
Altérer la vertu, c'est altérer l'amour.

Un vieillard :

L'hymen m'a protégé sous ses chastes auspices.
Je suis époux et père, et voilà mes enfants
Soldat, j'ai combattu ; voilà mes cicatrices !
Et mes fils, à leur tour, reviendront triomphants.

Un jeune garçon :

Oui, oui : pour tout Français les combats ont des charmes.
Tout Français est soldat, nous suivrons vos drapeaux.


Une petite fille :

Nous filerons pour vous ; voilà, voilà nos armes
Quand vous tiendrez le fer, nous tiendrons des fuseaux.

Un vieillard aux jeunes filles :

Dans l'humble fil qui coule entre vos doigts flexibles,
Un jour, jeunes beautés, vous prendrez des époux.
Soyez chastes, sans art, raisonnables, sensibles.
Plus vos cœurs seront purs, plus vos nœuds seront doux.

Aux jeunes garçons :

Et vous, guerriers naissants, en volant aux alarmes,
Songez que nos vertus sont nos premiers exploits.
La Liberté souvent se perdit par les armes.
Remplissons nos devoirs, nous soutiendrons nos droits.
Notre cœur nous le dit, sa voix est toujours juste :
L'homme est l'égal de l'homme, ô sainte, ô douce loi !
Nous jurons par le Ciel, et sur ce livre auguste,
De vivre, de combattre et de mourir pour toi.

Aux mères :

Mères, dans vos enfants, que par votre industrie,
Vos exemples surtout, le mal soit combattu.
Vous les enfanterez deux fois à la patrie,
Si vous les faites naître aux mœurs, à la vertu.

Les hommes :

Femmes, de nos berceaux vous êtes souveraines
Oui, le Ciel l'un pour l'autre a voulu nous former.

Les femmes :

Nous, pour plaire à vos yeux, pour adoucir vos peines.

Les hommes :

Et nous, pour vous défendre ; et nous pour vous aimer.

Le chef du chœur :

Malheur au cœur trompé, qui, dans un faux système,
Sans femme, sans enfants, n'exista que pour lui !
Il se cherche, il vieillit, il meurt, et dans lui-même
Il n'aura rien trouvé que le vice ou l'ennui.

Ô charmes de l'hymen ! L'homme heureux et tranquille
Par toi remplit le sort pour lequel il est né.
La peine a des plaisirs ; son bonheur est utile.
Il marche librement sous un joug fortuné.

Tendres soins d'une épouse, enfants, précieux gages,
Pudeur, travail, repos, bonheur venu des cieux,
Respect des cheveux blancs, ô touchantes images
Vous ravissez mon cœur, vous enchantez mes yeux.

Les femmes :

Et toi, fuis loin de nous, détestable adultère,
Qui de tant de forfaits ouvres, seul, les chemins
Tu souilles un lit pur d'une race étrangère ;
L'opprobre est sur tes pas ; le fer est dans tes mains.

Ciel ! Que de nos époux, que de nos tendres pères
Les jours soient doucement filés comme ce lin
Conserve-nous pour eux. Hélas ! Nous sommes mères :
Préserve nos enfants du sort de l'orphelin.

Les hommes :

Pour soutenir nos droits, notre ardeur héroïque
De nos exploits partout sema les monuments.
C'est peu de la valeur : de notre République
Sur l'hymen, sur les mœurs posons les fondements.