Amour républicain (L')

Auteur(s)

Année de composition

1795

Genre poétique

Description

Huitains d'octosyllabes en rimes croisées

Texte

Air : Ce fut par la faute du sort

Un essaim de jeunes Beautés,
Conduisant l'Amour à sa suite,
Devant un de nos comités,
Vint un jour citer sa conduite.
L'orateur dit au président,
Avec la plus vive éloquence :
Citoyen, voici le tyran
Le plus, dangereux de la France.

L'Amour aussi-tôt répondit :
De quoi vous plaignez-vous les Belles ?
Hélas ! Si je vous ai séduit,
Vous vous lassiez d'être cruelles.
Un seul instant de mes plaisirs,
Bien souvent effaça vos peines ;
Mais quand on voit fuir les désirs,
On ne supporte plus mes chaînes.

J'aimai toujours l'Égalité ;
J'allais la trouver au village ;
La Franchise & la Liberté
S'empressaient d'être du voyage.
On me voit peu. parmi les grands ;
Mais souvent dans une chaumière :
Car je préfère aux plus hauts rangs
Le joli sein d'une bergère.

Quelqu'un voudrait-il m'accuser
D'une fortune scandaleuse ?
J'estime plus un doux baiser
Qu'une abondance fastueuse.
De mon costume est-on jaloux ?
C'est celui d'un bon patriote :
Citoyennes, qu'en pensez-vous,
Ne suis-je pas un sans-culotte ?

Vous savez que pour mon séjour,
Dès long-tems j'ai choisi la France,
Et chaque Belle tour à tour
Peut attester ma résidence.
Pour prouver à mon délateur
Combien j'aime la République,
J'offre mes ailes de bon cœur
En premier don patriotique.

 
 

Sources

Almanach des Grâces pour la IIIe année républicaine, Paris, Cailleau, 1795, p. 157-158.