Couplets à une jeune religieuse, lors de la suppression des couvents
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Mots-clés
Musique
Paratexte
Texte
Air : On compterait les diamants
La loi, pour vous, en jour serein,
Églé, change la nuit profonde :
Notre Sénat rend le larcin
Que le cloître avait fait au monde ;
De la Nature, à qui mieux mieux,
Osons célébrer les apôtres :
Ils viennent de combler nos vœux,
Puisqu'ils ont aboli les vôtres.
La chrysalide, avec transport,
Quitte sa tombe diaphane :
Telle on vous voit prendre l'essor
Vers un siècle jadis profane ;
De l'émail des plus belles fleurs
L'insecte a diapré ses ailes,
Et les plus brillantes couleurs
Brillent sur vos robes nouvelles.
Obéir fut votre destin :
Léguer sera votre partage ;
Oui, le plus fier républicain,
Par vous, chérira l'esclavage.
Aux pieds d'un derviche en courroux,
Vous redoutiez son anathème ;
L'oracle parle : à vos genoux,
Le confesseur tombe lui-même.
Qu'ils sont changés vos alentours !
Cypris y remplace Marie ;
Au lieu des anges, les amours
Logent dans votre galerie.
Les pompons chassent les agnus ;
L'art d'aimer succède à l'office,
Et la ceinture de Vénus
A pris la place du cilice.
Votre voix, d'un triste verset,
Traînait la fade psalmodie :
Par elle, aujourd'hui, d'un couplet,
Comme la grâce est embellie !
Toujours vos pas étaient notés,
Par l'impitoyable décence ;
Et dans nos jeux, quand vous sautez,
Guimard enviait votre danse.
Vous riez des sombres romans
Dont s'épouvante une béguine ;
Du prisme, des enchantements
Un esprit sage s'illumine.
Aimez longtemps à visiter
Nos cercles plus que nos chapelles ;
La grâce pourra vous quitter,
Les Grâces vous seront fidèles.