Doléances de M. de La Routine, ci-devant procureur en la Cour, sur le calcul décimal, et sur autre chose

Auteur(s)

Année de composition

1797

Genre poétique

Description

Quatrains d'alexandrins en rimes croisées

Mots-clés

Musique

Paratexte

Texte

Ce calcul décimal ne vient pas de nos pères ;
Donc il faudrait partout le mettre à rémotis.
Il appert en effet, d'après des preuves claires,
Que douze, en tous les temps, ont mieux valu que dix.

Fidèle observateur des vieux us de nos pères,
Je n'aime que Lansberg et que Nostradamus.
Pythagore est un sot, un païen sans lumières ;
Son cher nombre de dix n'aura pas le dessus.

Aussitôt qu'un savant, sans respect pour nos pères,
De ce nouveau calcul vante l'utilité ;
Crions à nos voisins, surtout à nos commères :
C'est du jacobinisme et de l'impiété.

Déchaînons contre lui les journaux de nos pères,
Et certains beaux esprits, ci-devant esprits forts,
Qui voudraient voir brûler leurs ci-devant confrères,
Helvétius, Rousseau, Voltaire et leurs consorts.

Mesurons nos esprits à l'âme de nos pères :
Ayons soin que nos clercs jeûnent le vendredi ;
Car le nom de Vénus, en tête des bréviaires,
Est plus édifiant que le mot quintidi.

Se pourrait-il qu'un jour, en dépit de nos pères,
On n'eût qu'une mesure en tous lieux, et qu'un poids ?
Ne reverrai-je plus ces grosses salutaires
Où j'aurais voulu faire œuvre de douze doigts ?

Dans mon barème à moi, le louis de nos pères,
Sur ces modernes francs aurait dû l'emporter…
Si la paix est le fruit de nos palmes guerrières,
J'ai peur qu'il ne me faille à mon tour décompter.

 
 

Sources

Almanach des Muses pour l'an VI de la République française, ou Choix des poésies fugitives de 1797, Paris, Louis, an VI, p. 179-180.