Fondeurs de la République (Les)

Année de composition

1794

Genre poétique

Description

Huitains d'octosyllabes en rimes croisées

Texte

Air : Fidèle époux, franc militaire

Le métier qui va bien en France,
Amis, c'est celui de fondeur ;
Le fondeur fait pour la finance,
Autant que le législateur.
Les fondeurs, épurant les cloches,
Font des gros sous et des canons :
D'autres qu'eux, épurant nos poches,
Prennent ce que nous y mettons.

Du bon Dieu l'on fond la vaisselle,
Avec les plats des ci-devants ;
On fond de la monnaie nouvelle
Qu'on nomme pièces de cinq francs :
Chacun les trouve très jolies,
Mais le peuple en a rarement ;
Car les chefs de nos fonderies
Se font payer en argent blanc.

Avec les boulets et les armes,
Des cœurs en bronze sont fondus ;
Le peuple en vain se fond en larmes,
En voyant tous ses biens perdus.
Nos fondeurs ont de dures âmes,
Et sans écouter nos soupirs,
Par le vin, le jeu, chez les femmes
Ils vont se fondre de plaisirs.

Pour le bien de notre patrie,
Il faut que le législateur
Ferme plus d'une fonderie
Ouverte pour notre malheur ;
Sans être fin en politique,
Sans être au rang des grands esprits ;
Aux fondeurs de la République,
Écoutez ce que je prédis :

S'ils ne font de bonne besogne ;
Pauvre peuple, par l'étranger,
La France, ainsi que la Pologne,
Un jour se verra partager.
Le riche aura beau se morfondre,
Tous ses biens seront confondus :
Si les rois viennent nous refondre,
Fondeurs, vous serez tous fondus.