Musique de Lesueur

Levons-nous : un tribun perfide
De son orgueil foule nos droits ;
Pour subir son joug homicide,
Avons-nous triomphé des rois ?
Parlez, favoris de Bellone ?
Aux champs de Fleurus et d'Argone,
Pour lui lanciez-vous le trépas ?
Et vous, enfants de Polymnie,
Pour consacrer sa tyrannie,
Chantiez-vous l'hymne des combats ?

Réveillons-nous : de sa furie
Arrêtons le coupable essor :
Entre un rebelle et la patrie,
Pouvons-nous balancer encor ?
Réveillons-nous : etc… en chœur.

Comme au tronc d'un chêne robuste,
Enlaçant ses bras tortueux,
S'élève en rampant un arbuste
Qui l'enveloppe de ses nœuds ;
Ce lâche et ténébreux reptile,
Attachant son orgueil servile
Au chêne de la liberté,
Surmonte ses rameaux sublimes,
Et du luxe affreux de nos villes
Menace leur fécondité.

Réveillons-nous : de sa furie
Arrêtons le coupable essor :
Entre un rebelle et la patrie,
Pouvons-nous balancer encor ?
Réveillons-nous : etc… en chœur.

Quel monstre avec plus d'artifice
Cacha ses obliques projets ?
Ô nuit ! De ses fureurs complice,
Que tu révèles de forfaits !
Fille puissante des ténèbres,
La terreur, à ses cris funèbres
Mêle les accents de l'airain ;
Et dictant ses décrets sinistres,
Elle déchaîne ses ministres
Contre le peuple souverain.

Réveillons-nous : de sa furie
Arrêtons le coupable essor :
Entre un rebelle et la patrie,
Pouvons-nous balancer encor ?
Réveillons-nous : etc… en chœur.

Pour des crimes imaginaires,
Ainsi la hache de Thémis
Frappa la vieillesse des pères
Sur les corps épars de leurs fils ;
Ainsi l'épouse infortunée,
Avec le fruit de l'hyménée,
Périt en pleurant son époux ;
Et de sa dépouille opulente
Grossit la fortune sanglante
D'un tyran avare et jaloux.

Réveillons-nous : de sa furie
Arrêtons le coupable essor :
Entre un rebelle et la patrie,
Pouvons-nous balancer encor ?
Réveillons-nous : etc… en chœur.

Accourez, ombres éplorées,
Triomphez de ses attentats,
Et de vos mains désespérées
Signez l'arrêt de son trépas :
Frappez sur ses lâches complices ;
Dans l'image de vos supplices,
Qu'il trouve des tourments nouveaux :
Némésis, pour punir ses crimes,
Le traîne au char de ses victimes,
Et vous rappelle des tombeaux.

Réveillons-nous : de sa furie
Arrêtons le coupable essor :
Entre un rebelle et la patrie,
Pouvons-nous balancer encor ?
Réveillons-nous : etc… en chœur.

C'en est fait ! D'un tribun farouche,
Le glaive a puni la fureur :
La liberté fut dans sa bouche,
Le despotisme dans son cœur.
Des lois, ô suprême puissance !
Il croyait asservir la France :
De ses complots quel est le fruit ?
Ils viennent à peine de naître ;
L'aurore les voit disparaître
Avec les ombres de la nuit.

Triomphe, humanité chérie !
Dans nos murs ramène la paix,
Et que l'autel de la patrie
Soit raffermi par tes bienfaits !