Mon siècle, ou les trois satires
Auteur(s)
Paratexte
Impius ante aras, atque auri caecus amore,
Clam ferro superat…
Énéide, Liv. I
Au lecteur
Si tu trouves mes vers mauvais, censure-les sans pitié : mais censure avec un égal courage les ridicules et les vices que j'ose attaquer ; car ils sont plus dangereux que mes vers, quelque méchans que tu puisses les trouver.
Texte
Les portraits
Première satire
C'est trop garder, Philinte, un coupable silence :
Je veux des mœurs du jour châtier la licence ;
Je veux, par la satire, armé d'un vers sanglant,
Poursuivre sans pitié ce ramas insolent
De faquins, dont l'orgueil révèle la bassesse,
Dont le crime ou l'intrigue ont fondé la richesse ;
De voleurs, engraissés du sang de nos soldats,
Qui, dans des chars si hauts, montrent des cœurs si bas ;
De l'honnête homme à pied, dans leur course rapide,
Heurtant à chaque pas la démarche timide ;
Et s'offrant à nos yeux, justement courroucés,
Traînés par les chevaux que leur main a pansés.
Si, dans ces vers hardis, ma Muse accusatrice
Attaque le méchant et démasque le vice ;
Elle sait respecter le sage magistrat,
Le guerrier valeureux dont s'honore l'État.
Bonaparte ! Moreau ! Noms chers à la victoire,
Dignes héros ! Volez au temple de la Gloire !
Étonnez l'univers du bruit de vos exploits !
Aux peuples affranchis dictez d'heureuses lois.
La France vous chérit, l'Europe vous admire ;
Et même à vous louer vous forcez la satire.
Ah ! C'est contre vous seuls que j'aiguise ses traits,
Vous tous qui de Verres surpassez les forfaits !
Vous, héros riches d'or et pauvres de courage,
Lâches dans les combats,mais ardens au pillage !
Idoles ! Que d'un coup le sort peut renverser,
Que l'aveugle Fortune ordonne d'encenser,
Que flatte l'intérêt, que la vertu méprise,
Il est tems qu'à la fin la raison vous détruise.
Oui, j'oserai briser le prisme séducteur
Que réfléchit sur vous un cercle adulateur :
Oui, contre moi dussé-je armer toute la ville,
Dût l'univers entier me traiter de Zoile,
J'oserai, dans mes vers, par le courroux dictes,
Des vices opulens peindre la nudité.
Muse, arme-moi contr'eux des traits du ridicule !
Vois-tu ce fier guerrier, musclé comme un Hercule ?
C'est l'orgueilleux Narbas : général inconnu,
De bassesse en bassesse à ce rang parvenu,
Il commande aux soldats qu'indigne sa présence ;
En héros de théâtre à leur tête il s'avance…
Tel nous l'avons tous vu jadis aux boulevards
Danser chez Nicolet en costume de Mars.
Est-ce ainsi qu'un guerrier doit former son courage,
Et des mâles vertus faire l'apprentissage ?
On croit voir à son geste, à son noble regard,
Le digne successeur des Guesclin, des Bayard :
Ne vous y trompez pas : brave pour la parade,
Au seul bruit du canon le héros est malade.
On dit que ce guerrier, si fier loin des combats,
Sur le champ de bataille a fait plus d'un faux pas,
Et fuyant le chemin qui mène à la victoire,
Sur les pas de S*** il vole vers la gloire.
Esprit vil, apprends-moi quel sentier écarté
T'a conduit jusqu'au poste où je te vois monté ?
Ah ! Jamais la candeur, l'équité, la décence,
Le véritable honneur, et la noble vaillance
N'ont suivi ces détours du mérite inconnus,
Hélas, trop fréquentés des nouveaux parvenus !
Apprends-moi donc enfin, quels dons de la Nature ?…
Mais je crois m'en douter… Ta superbe stature
A des beautés du jour éveillé les désirs ;
Et la brillante étoile a payé tes plaisirs.
Ainsi par une route, aujourd'hui trop commune,
La volupté conduit les sots à la fortune.
Pour parvenir au rang dont il est revêtu,
L'ambitieux Orgon, n'eut pas d'autre vertu.
Autrefois mon égal, et moins que moi, peut-être,
Orgon dans ma disgrâce, ose me méconnaître :
Superbe en sa faveur, il repousse un ami.
Qui le consolera si le sort ennemi,
Dissipant des honneurs la brillante chimère,
Lui rend de son état l'obscurité première ;
Le ciel n'offre aux humains que des biens passagers !
Si tous les ans l'automne enrichit nos vergers ;
L'hiver vient à sa suite, et bientôt les désole.
Conservons un ami dont la voix nous console !
Et craignons que l'orgueil, étouffant l'amitié,
Du sein de nos égaux ne chasse la pitié !
Sachons que des mortels la fortune se joue,
Aujourd'hui les élève au sommet de sa roue,
Demain les en fait choir ; volage en ses faveurs,
Mais trop souvent, hélas, constante en ses rigueurs !
Licidas en a fait la dure expérience.
Dans Paris, étonné de sa magnificence,
Jadis il promenait son luxe et son orgueil.
Il courait en aveugle, et ne vit pas l'écueil
Où devait se briser tout ce riche équipage.
L'or un jour lui manqua, son crédit fit naufrage :
Maîtresse, courtisans, carrosses et coursiers,
Tout fuit, tout disparut ; tout… hors ses créanciers.
Ne pouvant les payer, honteux, il prit la fuite :
Mais en vain ; cent recors étaient à sa poursuite.
Il ne peut faire un pas sans trouver un huissier :
Il se désespérait… On le fit officier.
Depuis ce jour, dit-on, grâce à ses épaulettes,
Licidas ne craint plus d'être arrêté pour dettes.
De la fortune enfin, bisarre en ses revers,
Je pourrais te citer vingt exemples divers :
Mais viens de ses faveurs admirer le caprice.
Promène tes regards dans ce vaste édifice.
Singe de Lucullus, sur un sopha couché,
Et vers ses courtisans négligemment penché,
Mondor semble écouter d'un air de complaisance.
Ils prônent ses talens, ses vertus, sa naissance !
Impertinens flatteurs ! Eh ne craignez-vous pas
Que Mondor, ennuyé d'éloges aussi bas,
De ce bras, qui jadis fatiguait la charrue,
Pour prix de vos discours ne vous jette à la rue ?
Et prouve, en repoussant un ridicule encens,
Qu'un nouveau parvenu peut avoir du bon sens ?
Ses vertus ! – Et, Mondor en aurait eu, peut-être,
S'il eût vécu paisible aux lieux qui l'ont vu naître.
Ses talens, sa naissance ! – Il naquit laboureur,
Et du champ paternel le paisible labeur
Fut de ses jeunes ans l'unique apprentissage.
Depuis deux ans, à peine, échappé du village,
D'abord petit laquais, et depuis fournisseur,
On le vit endosser l'habit de régisseur.
Notre homme, enorgueilli de sa nouvelle place,
Croit avoir du mérite, et n'a que de l'audace.
Par prudence souvent il se tient renfermé :
À de pesans fardeaux son bras accoutumé,
Trouve de son emploi la charge insupportable,
Quand, pour prendre la plume il faut quitter la table.
Veux-tu de cette humeur connaître la raison ?
À peine le Mondor sait-il signer son nom ;
Et des leçons qu'il prend, du maître d'orthographe,
Il n'a su retenir encor que le paraphe.
S'agit-il d'un concert, d'un opéra nouveau ?
Il court avec Thaïs s'afficher à Feydeau,
Applaudit dans G...t une mode nouvelle,
Et plissant ses collets sur cet heureux modèle,
On le voit, radieux, dans un garick brillant,
Promener sa sottise et son faste insolent,
Et briguer à Longchamp le prix de l'élégance.
Mais il s'entoure en vain de sa vaste opulence :
Comme l'âne couvert de la peau du lion,
Le fastueux Mondor sent le tour du bâton.
Au moindre mouvement le bout d'oreille passe.
On dit que, dans l'espoir d'obtenir une grâce,
Un poète lui fit l'hommage de ses vers.
Sans s'étonner il prend le volume à l'envers,
D'un regard protecteur affecte de le lire,
Accorde au postulant la faveur d'un sourire ;
Et puis, ouvrant sa bourse, il en tire un écu
Qu'il présente à l'auteur honteux et confondu.
Le trait était piquant, et l'affront légitime,
Philinte, et je suis loin d'en plaindre la victime.
Que cet exemple, au moins, lui serve de leçon !
Qu'il offre désormais l'encens de l'Hélicon,
Aux talens, aux vertus, à l'honneur, au courage !
Des savans, des héros la gloire et l'apanage.
Si, de quelque génie Apollon t'a doté,
Si d'un souffle divin tu te sens agité,
Fils des Muses ! Bannis tout intérêt sordide !
Qu'une plus noble ardeur et t'enflamme et te guide !
De nos guerriers vainqueurs célèbre les exploits,
An son de leurs clairons cours accorder ta voix ;
Du héros d'Aboukir éternise la gloire,
Et lègue à nos neveux tes vers et sa mémoire !
Mais, crois-moi, des Mondor évite le salon :
L'air seul en est mortel aux enfans d'Apollon.
Ou, dans un vers vengeur, si ta juste colère
Veut leur faire expier la publique misère,
Que le nom des Mondor figure en tes écrits,
Mais qu'il y soit couvert d'un éternel mépris !
– Où m'emporte, dis-tu, l'ardeur de la satire ?
On peut être honnête homme et ne pas savoir lire.
– Oui ; mais peut-on d'un sot faire un homme d'État,
De l'ignorant un juge, ou du lâche un soldat !
Près de l'astre brillant, où l'orgueil vous égare,
Mortels ambitieux, craignez le sort d'Icare.
Oui, Philinte, je sais que d'une dignité,
Que d'un grade éminent l'amour-propre est flatté ;
Mais le cœur jouit mieux de cet honneur insigne,
Lorsque de l'accepter il se sent vraiment digne.
Qui s'élève trop haut est près de succomber,
Du sommet des grandeurs il est dur de tomber :
La route est escarpée et la chute facile.
Heureux, cent fois heureux, l'homme sage et tranquille
Qui, maître de son cœur, vit dans l'obscurité
Sans briguer un éclat qu'il n'a pas mérité.
Moins de fléaux, sans doute, accableraient le monde,
Si, loin du vain espoir où leur âme se fonde,
Les mortels, étrangers aux haines, aux partis,
Coulaient en paix les jours qui leur sont départis !
Et si, moins tourmentés du désir de paraître,
Pour tracer des sillons quand le ciel les fît naître,
Contens de leur état, exempts de vains besoins,
À fatiguer la terre ils bornaient tous leurs soins.
L'intrigue et les mœurs
Seconde satire
Ô honte de mon siècle ! Ô France désolée !
De quels excès affreux le vice t'a souillée !
On parle de morale et l'on n'a plus de mœurs :
Le luxe et la licence égarent tous les cœurs :
Esclave de la mode, on voit l'homme fantasque,
Changer à tous momens de projets et de masque.
Dans les cercles brillans où nos jeunes beautés
Découvrant à l'envi leurs charmes déhontés,
Où la corruption se répand et circule,
La modeste vertu n'est plus qu'un ridicule.
Vois-tu ces merveilleux qui peuplent nos salons ;
Philosophes valseurs, petits-maîtres profonds.
D'un obscène rébus applaudir la pensée ;
Sourire à l'embarras de la candeur blessée,
Persiffler sans pitié le front adolescent,
Qui sait rougir encor d'un bon mot indécent,
Et, couvrant d'un bandeau les yeux de leur victime,
Entraîner la vertu dans le sentier du crime.
Jadis nos bons aïeux, sages dans leurs désirs,
Sans blesser la pudeur, se livraient aux plaisirs :
Ils faisaient de la danse une école des grâces :
La décente gaîté voltigeait sur leurs traces.
Vit-on jamais chez eux l'impudique beauté
Se pâmer, en valsant, ivre de volupté ?
Te peindrai-je en effet cette danse lubrique !
Vois Cléon et Zélis, au son de la musique,
Leurs pieds contre leurs pieds en cadence pressés,
Tourner en balançant leurs bras entrelacés.
Du mouvement du globe imitant le système,
Ils décrivent un cercle en tournant sur eux-même,
Zélis, arrondissant ses bras voluptueux,
Enchaîne dans leurs lacs son danseur trop heureux :
Ou, dans ceux de Cléon à son tour enchaînée,
L'œil mourant de plaisir, la tête abandonnée,
De mille appas, où l'or se joue effrontément,
Elle étale à ses yeux le spectacle charmant.
Vois-tu Cléon en feu sur sa gorge d'albâtre,
Fixer avidement un regard idolâtre ;
Et presser, d'une main qu'égare le désir,
Son cœur qu'un léger voile a peine à contenir ?
L'époux est là : tranquille, il contemple en silence
De leur tendre abandon la publique indécence.
Moi, je fuis indigné. Mais ce siècle pervers
Philinte, à chaque pas m'offre un nouveau travers.
Pénétrons dans ces lieux, où, guidés par le vice,
Les mortels d'un plaisir se sont fait un supplice.
La bouillotte est leur culte, et Plutus est leur dieu.
Sans cesse possédés par le démon du jeu,
Plaçant sur un brelan leur craintive espérance,
Ils guettent d'un va-tout la favorable chance.
Trois cartes à la main, on les voit jour et nuit,
Disputer un peu d'or dont l'appât les séduit.
Le sort a prononcé : dissimulant sa joie,
Le vainqueur froidement s'empare de sa proie.
Le vaincu, concentrant sa jalouse fureur,
S'efforce à la masquer sous un calme trompeur.
Léandre appelle en vain le rire sur sa bouche.
Le désespoir se peint dans son regard farouche.
En vain Timante affecte un maintien assuré :
Contemple sa pâleur : dans son œil égaré,
Reconnais le remords dont le trait le tourmente !
Il a souri !… Philinte… Ah ! frémis d'épouvante !
Il presse sur lui-même un bras désespéré,
Et de ses propres mains son flanc est déchiré.
Osera-t-il revoir son épouse et sa fille ?
Comment soutiendra-t-il l'aspect de sa famille ?…
De l'intrigue et des mœurs poursuivons le tableau.
Quel est ce jeune fat qui s'offre à mon pinceau ?
C'est Delmont : fils ingrat, il rougit de son père,
Qu'il laisse sans pudeur languir dans la misère !
Et son palais, ouvert aux vices opulens,
Résonne au loin du bruit de ses festins brillans !
Vois le, perfide époux, abandonnant sa femme,
Offrir à nos Laïs et sa bourse et sa flamme :
Sa femme disputant de scandale et d'excès,
Affiche ses erreurs comme autant de succès.
L'usure est en honneur, ainsi que l'adultère.
L'infâme délateur, le faux dépositaire,
Ravisseurs impunis de nos biens, de nos droits,
Marchandent au barreau le silence des loix !
J'entends louer partout l'homme, opprobre de l'homme,
Infâme partisan des vices de Sodome ;
La moderne Sapho, dont la lubrique ardeur
De nos jeunes beautés égare la candeur :
L'ami qui nous sourit quand le sort nous caresse,
Et qui, dans nos revers, nous fuit et nous délaisse ;
L'égoïste au cœur froid, sourd aux plaintes d'autrui,
Qui dans le monde entier, ne voit, n'aime que lui ;
Et je serais muet ! Ah ! Tout mon sang s'allume !
Austère vérité ! Viens conduire ma plume ;
Contre tous les excès que j'ose signaler,
Lorsque la loi se tait la vertu doit parler.
Que l'intrigue, Philinte, est féconde en ressources !
De ses prospérités connais toutes les sources.
À qui Damis doit-il l'éclat de ses rubis,
Et sa table opulente et ses riches habits,
Et ses cheveux anglais, l'honneur de Bagatelle,
Et son charmant Bockey, chef-d'œuvre de Bruxelle ?
À l'aimable moitié d'un riche fournisseur,
Qui lui donne à la fois et sa bourse et son cœur.
La tendre Zilia dont l'or et les dentelles
Font depuis quinze jours le désespoir des belles ;
Zilia, qui partout prône le sentiment,
Doit toute sa parure aux dons de son amant.
Delcour, petit commis dans la haute finance,
Tranche dans nos salons de l'homme d'importance.
Il ne se donne pas un seul concert, un thé,
Que par un doux message il n'y soit invité.
On l'accueille en tous lieux, on le prône, on le cite,
Le beau sexe en raffole… Eh quel est son mérite ?
Il fait des calembourgs ! – C'est la mode aujourd'hui.
L'auteur du Séducteur pâlirait près de lui.
Ce rébus effronté charme toute la France,
Flatte les Grands, se rit de la faible innocence,
Et se glisse partout. D'obscènes calembourgs
L'homme d'État souvent hérisse ses discours.
Des plus douces faveurs ils nous ouvrent la porte :
Il est tel calembourg, bon ou mauvais, n'importe,
Qui valut à l'auteur l'emploi le plus brillant.
Ah ! Que n'ai-je du ciel reçu ce beau talent !
On accorde à Germeuil une éminente place :
A-t-il de l'esprit ? Non : mais il danse avec grâce ;
Iris aime la valse ; il valse avec Iris :
Germeuil doit sa fortune aux leçons de Vestris.
Dirlac, pour parvenir prenant une autre route,
Cultive avec succès l'art de la banqueroute.
Dorsi prête sur gage, à dix pour cent par mois,
De l'or dont en secret il allège le poids.
Le sophiste Varron dit, à qui veut l'entendre,
Qu'il n'est pour s'enrichir qu'un art : celui de prendre.
Alidor, qui le croit, disciple intelligent,
Troque sa probité centre un rouleau d'argent.
L'adroit Damon excelle à filer une carte.
Instruit dans les talens qu'on professoit à Sparte,
Son ami Forbignac, non moins souple que lui,
Puise l'or qu'on lui voit dans la bourse d'autrui.
Lisis, dont en cent lieux on vante le courage,
Sous le nom de chouan masquant son brigandage,
Exerce noblement le métier de voleur,
Et ravit poliment l'argent du voyageur.
Est-ce un crime après tout ? Piller la diligence !
Rien de plus naturel : partout on vole en France.
L'avide fournisseur fait solder par l'État
Le pain et les habits qu'il dérobe au soldat.
Le garde-magasin, opulent subalterne,
Noyant tous ses calculs dans des flots de Soterne,
Sur un léger whisky court, cirez la Montansier,
Prodiguer son hommage aux beautés du foyer :
Où, d'un pied trébuchant, il va dans la coulisse
Marchander les faveurs de la nouvelle actrice.
Et comment soutient-il ce luxe impertinent ?
Il vole, il vole, il vole, et voilà son talent.
Sur le sang du guerrier, couvert de cicatrices,
Honorables témoins de ses nombreux services,
Un commis décoré du nom de directeur,
Calcule froidement sa future splendeur.
Le héros mutilé, vétéran invalide,
Jadis de son pays défenseur intrépide,
Dans l'asile où l'État, accorde à ses vieux jours
Un modique salaire et de faibles secours,
Voit, par de vils brigands, sa vieillesse affamée ;
Ils infestent la ville, ils infestent l'armée.
Ardens spoliateurs des trésors de l'État,
Des plus brillans exploits ils ternissent l'éclat.
Comme autant de vautours acharnés sur leur proie.
Que d'illustres fripons, brodés d'or ou de soie,
S'engraissent aux dépens du soldat valeureux
Qui combat nuit et jour pour la France et pour eux !
Il n'est aucun danger que sa valeur redoute ;
Il emporte d'assaut ville, fort et redoute ;
Le Danube et le Rhin, l'hiver et ses frimats,
Avalanches, torrens, rien n'arrête ses pas ;
Orgueilleux conquérant de la superbe Autriche,
Ceint de tant de lauriers, il n'en est pas plus riche :
Vainqueur de l'ennemi, mais vaincu par la faim,
Nus pieds, transi de froid, il demande son pain.
Et cependant, tout l'or conquis par sa vaillance,
Va d'un tas de brigands accroître l'opulence.
L'ordonnateur lui doit son cuisinier fameux ;
Straphon, son vin du Cap et son tokay fumeux ;
Il ouvre au vieux Chratès le boudoir d'Émilie,
À Phorbas les trésors d'une riche abbaye.
Il soustrait le coupable à la rigueur des lois ;
Il conduit la sottise aux plus riches emplois.
De notre siècle enfin l'or est le seul mobile.
Le magistrat nous vend la liberté civile ;
Le juge au tribunal vend ses conclusions.
Voulez-vous du tumulte et des séditions ?
Gagez dans les faubourgs un émissaire habile :
Et vous aurez bientôt les faubourgs dans la ville.
Vous aurez tout enfin si vous avez de l'or.
Tous les biens, tous les maux sont dans votre trésor.
Le sexe, sous l'appât des plus vives tendresses,
Vous vendra pour de l'or ses trompeuses caresses.
Le guerrier, pour de l'or infâme déserteur,
Trahissant à la fois et son poste et l'honneur,
Aux phalanges du Nord ouvre nos citadelles.
Chargés d'or et de honte, ô guerriers infidèles,
Vous cherchez un asile en de lointains climats ;
Mais l'opprobre vous suit et s'attache à vos pas.
Fuyez !… Allez vieillir sans gloire, sans patrie,
Tourmentés des remords dus à la perfidie !
Tu frémis au récit des coupables excès
Dont le seul souvenir fait rougir les Français.
Contre des maux plus grands arme-toi de courage !
Déjà des passions j'entends gronder l'orage.
J'entends mugir au loin cette mer en fureur,
Philinte, où l'homme errant au gré de son erreur,
Aveugle en ses désirs, d'or et d'honneur avide ;
Tantôt souple, rampant, tantôt fier, intrépide,
Fuit le calme et la paix qu'il goûtait dans le port ;
Et bravant les écueils, la tempête et la mort,
S'efforce d'aborder les îles escarpées
Qu'habitent les grandeurs trop souvent usurpées.
Là je vois les mortels gouvernans, gouvernés,
Vers le bien, vers le mal tour à tour entraînés,
Franchissant de l'honneur la barrière importune,
Poursuivre en se heurtant le char de la fortune :
Et tyrans orgueilleux ou vils adulateurs,
Je le vois mendier ou vendre les faveurs ;
Trouvant, pour parvenir, tout sentier légitime,
S'élever au pouvoir sur les degrés du crime ;
Et de nos droits privés, et du salut public
Faire avec impudeur un odieux trafic.
Sur le terrain glissant où l'erreur les engage,
S'il paraît un mortel plein d'un rare courage,
Qui, ferme en sa conduite et sage en ses discours,
De ces débordemens veuille arrêter le cours,
De la vénalité réprimer l'impudence
Et de nos corrupteurs gourmander la licence…
Vous le verrez bientôt dénoncé, condamné,
Dans la nuit des cachots indignement traîné…
– Mais tu trembles, Philinte ! Eh ! Qu'as-tu donc à craindre ?
– Votre franchise. – Quoi ? – Sachez mieux vous contraindre,
Sachez dans vos écrits voiler la vérité.
– Moi, j'ignore cet art par le lâche inventé.
– Du méchant démasqué redoutez la puissance.
– Je crains son amitié bien plus que sa vengeance.
– Vous allez vous créer de nombreux ennemis :
Vous serez condamné de vos propres amis.
– Mes amis ! Si j'en ai, m'aimeront davantage ;
Ils sauront estimer mon vertueux courage :
Ils sauront préférer le mortel généreux
Qui brise les autels consacrés aux faux dieux,
À ces vils courtisans qui, chargés d'or et d'ambre,
Vont des Midas du jour parfumer l'anti-chambre ;
Et, d'un sot parvenu recherchant la faveur,
Quêter sur son passage un regard protecteur :
Hommes à double face ! En l'absence du maître,
Pleins d'orgueil ! Mais rampans dès qu'il vient à paraître :
Tant qu'il est en faveur, attachés sur ses pas,
Ils le prônent tout haut, le déchirent tout bas :
Fût-il plus contrefait que ne le fut Ésope,
Plus boiteux que Vulcain, plus hideux qu'un Cyclope !
Midas est riche !… Donc, Midas est fait au tour ;
Il est plus fort qu'Hercule, et plus beau que l'Amour.
C'est ainsi qu'aujourd'hui la louange circule,
Et flatte impunément la vanité crédule.
Sur des autels plus purs qu'on allume l'encens,
Qu'on prône la vertu, Philinte, j'y consens.
En vices odieux si l'univers abonde,
Dieu créa la vertu pour consoler le monde.
L'Italique héros, l'olivier à la main,
Vainqueur, offre la paix au superbe Germain,
Cependant près de lui l'auguste bienfaisance
Accueille le malheur, soulage l'indigence :
La France et l'Ausonie attestent sa bonté.
Philinte, eh ! Dans quel tems vit-on l'humanité,
Se montrer aux mortels plus affable et plus douce ?
Quel est l'infortuné que sa faveur repousse ?
Par l'aveugle destin jadis persécuté,
J'implorai son secours et j'en fus écouté.
Elle a fait des ingrats : mais au siècle où nous sommes
Les cœurs reconnaissans sont rares chez les hommes !
On reçoit le bienfait, on rit du bienfaiteur :
Moi, je sais l'honorer, et ne suis pas flatteur.
Aimable courtisan, déserte le Pactole :
L'or est le dieu des sots; encense une autre idole !
Cours, vole à Malmaison ; c'est là que Beauharnais
Sous de rians abris médite des bienfaits.
Les crimes
Troisième satire
À quel monstre odieux devons-nous tant de crimes,
Ces hordes de brigands, cet amas de victimes ?
À l'aveugle Plutus ; c'est lui dont les trésors
Ont brisé de l'honneur les fragiles ressorts :
Il souffla dans nos cœurs l'ambition cruelle,
Et causa tous les maux qu'elle entraîne avec elle.
De la corruption naquit l'impunité :
Lois, mœurs, religion, rien ne fut respecté.
L'anarchie étouffant la voix de la Nature,
En principe érigea le meurtre, le parjure,
Confondit tous les droits ; des prêtres égarés,
Des perfides époux rompit les nœuds sacrés :
Elle osa, d'une voix enhardie au blasphème,
Jusque dans le lieu saint insulter Dieu lui-même,
Opposer ses décrets à ceux de l'Éternel,
Égorger ses pasteurs, renverser son autel,
Disperser ses débris dans le sang des fidèles.
Ministre de la mort, de ses mains criminelles.
On la vit, aiguisant sa redoutable faulx,
Avide de trépas, s'entourer d'échafauds.
Dans sa rage elle arma le fils contre le père :
Le frère se baigna dans le sang de son frère.
Le serviteur, jadis fidèle à son devoir,
Écoutant d'un vil gain le criminel espoir,
D'un maître vertueux trompe la confiance,
Et sur lui des tyrans appelle la vengeance.
On vit le meurtrier hériter sans pudeur
De celui dont sa main avait percé le cœur.
De son palais auguste on vit Thémis bannie,
Et sur son trône en deuil siéger la tyrannie.
Plus de repos : on vit les beaux arts exilés,
Le théâtre avili, les marbres mutilés,
Les villages déserts, les cités dépeuplées ;
Les familles en pleurs, errantes, désolées,
Sous un ciel étranger précipitaient leurs pas.
Lebon, ivre de sang, à la fin du repas,
Les échafauds dressés et les victimes prêtes,
Savourait le plaisir de voir tomber leurs têtes.
Théâtre des fureurs d'un féroce assassin,
Éplorée et tremblante, Avignon dans son sein
Voyait avec horreur sa fatale glacière.
Des crimes de Carrier, complice involontaire,
La Loire, loin des bords par ce monstre habités,
Roulait, en murmurant, ses flots, ensanglantés.
La superbe Lyon, dont le rare courage,
Du barbare Collot accroît encor la rage,
Pleure en vain ses trésors par le crime envahis,
Sa jeunesse égorgée et ses palais détruits.
Dans la triste Orléans l'innocence succombe :
L'orgueilleuse Bordeaux tremble au nom de Lacombe.
Toulon offre l'aspect d'un immense cercueil.
Contemple de Verdun la douleur et le deuil !
Sur le char de la mort vois ces belles captives ;
Qu'escortent en pleurant leurs familles plaintives.
Victimes d'un tyran qu'avoit épouvanté
De leurs jeunes attraits la naissante beauté,
Elles s'en vont périr à la fleur de leur âge !
Mais la vertu les guide et soutient leur courage.
Sous le fer suspendu, les yeux levés au ciel,
Vois-les, le front serein, subir l'arrêt cruel ;
Leurs beaux yeux sont fermés, leur teint se décolore ;
Leur sang ne coule plus… Mais mon cœur saigne encore !
Sur ce même théâtre où la faulx du trépas
Moissonnait chaque jour les plus touchans appas ;
Femmes, enfans, vieillards, et sujets et monarque,
Tous tombent confondus sous les coups de la Parque.
Élisabeth mourante invoque la pudeur !
Elle expire… et son front peint encor la candeur.
Le sage magistrat dont la douce éloquence
Sut deux ans dans Paris contenir la licence,
Dont la France admirait les vertus, le savoir.
Sous le couteau fatal tombe sans s'émouvoir :
Sa mort trompe l'espoir de la docte Uranie.
Lavoisier dans la tombe enferme son génie.
Roucher !… De la Nature il chantait les bienfaits !
Ses travaux sont punis comme autant de forfaits ;
Et son ombre en grondant s'enfuit au noir rivage.
Roland qui réunit la grâce et le courage,
Les vertus d'une femme et l'âme d'un héros,
Voit trancher ses beaux jours par le fer des bourreaux.
Destaing atteste en vain ses aïeux et sa gloire,
Son nom déjà fameux aux fastes de l'histoire,
Sa valeur, et son sang versé dans cent combats :
Dumas a prononcé l'arrêt de son trépas.
Que sert, belle Corday, ton courage sublime ?
D'un noble dévouement lorsque tu meurs victime,
Marat au panthéon remplace Mirabeau :
Turenne et Du Guesclin sont chassés du tombeau !
Turenne, défendu par deux siècles de gloire,
Et dont le monde entier honore la mémoire !
À de nouveaux honneurs ses restes réservés,
Par l'ordre d'un tyran allaient être enlevés ;
Lorsqu'un Dieu, les couvrant d'une égide immortelle,
Les déroba sans doute à sa main criminelle.
Généreux défenseur de son roi détrôné,
L'illustre Malesherbe à la mort condamné,
Sans crainte offre au bourreau sa tête vénérable,
Et périt, innocent, de la mort d'un coupable.
Digne de sa vertu, l'aimable Rosambeau
Expire à ses côtés et le suit au tombeau.
Mais, quel nouveau spectacle ! Une reine enchaînée,
Comme un coupable obscur au supplice est traînée !
Tout Paris retentit des bruyantes clameurs
D'un peuple dont la joie insulte à ses malheurs.
De ce peuple jadis je l'ai vue entourée :
Elle régnait alors ; elle en fut adorée !
Vit-on une mortelle au faîte des grandeurs,
Briller de plus d'éclat, jouir de plus d'honneurs ?
Eh ! Quel œil sans effroi peut mesurer l'abîme
Où tomba tout à coup cette illustre victime ?
Est-il un cœur d'airain qui sans se fondre en pleurs,
Soutienne le récit de ses longues douleurs ?
Son époux égorgé sur les débris du trône,
Son fils adolescent, l'espoir de la couronne ;
Tel qu'un beau lys flétri d'un souffle envenimé,
Par un supplice lent dans ses bras consumé :
Sa liberté, son sceptre et sa fidelle amie,
Elle perd tout !… Sais-tu quelle main ennemie
Aiguise tous les traits qui déchirent son cœur ?
Celle d'un courtisan comblé de sa faveur :
D'un prince de son sang, dont la coupable audace
Vota la mort du roi pour régner à sa place…
Et qui, de ses amis bientôt abandonné,
Sur le même échafaud expire condamné.
De l'arrêt qui le frappe admirant la justice,
La France avec plaisir contemple son supplice.
« Mais pourquoi rappeler ces momens désastreux ?
Écartons, diras-tu, des souvenirs affreux :
Ouvrons, ouvrons nos cœurs à la douce espérance
Du bonheur qui bientôt va consoler la France ! »
Puissé-je, comme toi, promptement consolé,
Oublier tous les maux dont je fus accablé !
Mais du bonheur à peine ai-je entrevu l'aurore ;
Combien de ce beau jour nous sommes loin encore !
Je ne puis faire un pas sans voir de tous côtés
Les cruels artisans de nos calamités.
Je tremble à leur aspect… Ma mémoire fidelle,
Au récit de leurs noms aussitôt me rappelle
Mes parens, mes amis dans les prisons traînés,
Dépouillés de leurs biens, trahis, assassinés…
Moi-même devenu l'objet de leur furie,
Sous leur fer meurtrier prêt à perdre la vie :
Mon sang coula : la loi n'osa point les punir
Mais d'un crime ignoré pourquoi t'entretenir ?
As-tu donc oublié ? Dieu ! Je frémis encore
Au triste souvenir d'un forfait que j'abhorre ?
As-tu donc oublié ce jour, ce jour fatal,
Philinte, où dans l'horreur d'un complot infernal,
Un Consul, un héros, l'espoir de la Patrie,
L'honneur du nom Français devait perdre la vie ?
Hayden préludait ! À ses accords divins
Tout Paris enchanté s'écrie et bat des mains.
Fils d'Apollon ! Triomphe ! Un héros magnanime
Doit bientôt applaudir à ton œuvre sublime.
Sache créer des chants dignes de son grand cœur !
De ses vils ennemis enchaîne la fureur,
Et suspends les poignards qu'ils aiguisent dans l'ombre.
Sœur du Sommeil, la Nuit couvrait d'un voile sombre
Cette immense cité qui renferme en ses murs
Tant d'illustres héros et d'assassins obscurs.
D'un ramas de brigands la horde conjurée
D'une rue à dessein embarrasse l'entrée.
Un malheureux enfant, attendant leur retour,
Veillait pour eux… Hélas ! Ce fut son dernier jour !
Leur complice innocent et bientôt leur victime
Tranquille, il ignorait qu'il veillait pour le crime.
Bonaparte paraît : son conducteur adroit
Engage ses coursiers dans ce passage étroit,
Esquive l'embarras, et plus prompt que la foudre,
Dérobe le héros à l'éclat de la poudre.
Les monstres furieux de le voir s'échapper
Précipitent le coup qui devait le frapper.
Soudain une machine horrible, épouvantable,
Vomit partout la mort, la mort inévitable.
Tout Paris ébranlé tremble en ses fondemens ;
L'air retentit au loin de longs gémissemens :
On accourt : ô terreur ! Ô trame criminelle !
Le sang des citoyens de tous cotés ruisselle ;
Les pavés sont jonchés de décombres sanglans ;
On marche avec effroi sur des corps palpitans;
L'enfant tombe écrasé sur sa mère mourante ;
Ici l'amant expire aux pieds de son amante ;
Là, le père de sang et de larmes trempé,
Appelle en vain son fils que la mort a frappé.
Mais, malgré la douleur où les cœurs sont en proie,
Du milieu des mourans s'élève un cri de joie :
« Bonaparte respire, il vit, il est sauvé !
Rendons grâces au ciel qui nous l'a conservé ! »
Réponds à son espoir, jeune héros ! La France
Contre un crime inouï te demande vengeance.
Sois juste ! Pardonner au féroce assassin,
C'est réchauffer soi-même un serpent dans sou sein.
Le magistrat prudent doit condamner le crime ;
Qui l'absout tôt ou tard en devient la victime.
Perdre leurs bienfaiteurs est la loi des ingrats !
Au glaive de Thémis livre des scélérats
Dont l'atroce fureur souillant notre mémoire,
Inventa des forfaits inconnus dans l'histoire.
Ainsi, Philinte, ainsi mon esprit irrité
Gourmande d'un héros l'imprudente bonté ;
Et réveille en son cœur ces haines légitimes,
Que l'austère vertu de tous teins porte aux crimes.
Un poète flatteur eût prôné ses bienfaits ;
Il eût cité le nom des heureux qu'il a faits ;
Il eût dit, rappelant ses titres à la gloire,
Comment sous ses drapeaux il fixa la victoire,
Triomphant à Lodi, vainqueur dans Aboukir,
Comme il dompta l'Égypte et sut en revenir ;
D'un pouvoir tyrannique affranchit sa patrie,
Et du fer des Germains délivra l'Italie.
Il eût dit les exploits des illustres héros
Qu'il sut associer à ses nobles travaux ;
Macdonald couronné des lauriers qu'il moissonne
Sur les sommets glacés que la mort environne :
Et toi, fameux Breton, sage et vaillant Moreau,
Qui, nouveau Catinat, désertas le barreau ;
Et par un coup hardi, qu'eût applaudi Turenne,
As fait trembler Joseph, aux portes de Vienne !
Pour couronner son œuvre, il eût peint dans ses vers,
Bonaparte donnant la paix à l'univers.
Sur un sujet si beau ma muse doit se taire :
Pour chanter un Achille, il faut la voix d'Homère.
Alexandre eût rougi d'un poète ignoré :
D'aucun triomphe encor je ne suis honoré ;
J'en obtiendrai peut-être. Au ton de la satire
La vérité monta les cordes de ma lyre.
Eh bien ! Du ridicule ardent persécuteur,
Je veux berner le sot et siffler le flatteur :
Et frappant nos Midas d'une verge ennemie,
Marquer le scélérat du sceau de l'infamie !
Alors, foulant aux pieds l'intrigant abattu,
Le front ceint de lauriers cueillis par la vertu,
J'irai… De nos héros je chanterai la gloire ;
J'attacherai mon nom au char de la victoire :
Et mes vers, compagnons de leurs exploits fameux,
Au temple de mémoire entreront avec eux !