Motion civique d'un honnête citoyen du faubourg Saint-Antoine

Auteur(s)

Année de composition

1789

Genre poétique

Description

Paratexte

(Cette pièce a été composée quelques jours après l'arrivée du roi à Paris, & dans des moments de fermentation parmi le peuple)

Texte

Eh quoi ! Louis est au milieu de nous,
Et la discorde encor ramenant la licence,
Troublerait sous ses yeux nos moments les plus doux !
Non, citoyens ! Rassurez-vous,
Nos ennemis enfin sentent leur impuissance ;
Ils ont frémi nous voyant tous rangés
Sous le drapeau de la patrie :
Notre courage a bravé leur furie ;
Leurs complots sont détruits, et nous sommes vengés.
Mais vous, classes infortunées,
Hommes laborieux, viriles ouvriers,
Plus que jamais de ces êtres altiers
Redoutez les sourdes menées :
Leurs largesses empoisonnées
Vous poursuivront jusques dans vos foyers :
Ah ! Ne préférez pas, loin de vos ateliers,
Le prix du crime au fruit de vos journées !
Leur dernière ressource est la séduction :
Tandis qu'insolemment leur fol orgueil y compte,
Ne leur en ménagez que la confusion ;
Qu'ils n'en recueillent que la honte.
Membres de la société,
Gardez-vous d'en troubler l'ordre si nécessaire
Aux élans de la liberté.
Que la raison chez vous mette un frein salutaire ;
Courageux sans être cruels,
Humains jusques dans la vengeance,
Craignez surtout, craignez d'exposer l'innocence
Au châtiment des criminels.
Respectez de la loi l'autorité suprême,
Et déployant cette douceur
Qui du Français de tout temps sur l'emblème,
Méritez enfin le bonheur
De posséder ce bon roi qui vous aime :
Dans lui mille vertus ornent le diadème ;
Et la paix cependant se refuse à son cœur !
Il en goûtera la douceur,
Lorsque son peuple en jouira lui-même.

 
 

Sources

Almanach des Muses de 1790, ou Choix des poésies fugitives de 1789, Paris, Delalain, 1790, p. 209-210.