Ode alcaïque sur la Mort, ou Triomphe du jeune Barra, âgé de treize ans, tué par les rebelles dans la Vendée
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Paratexte
Traduction en vers français de l'Ode alcaïque sur la mort ou triomphe du jeune Barra, âgé de treize ans, tué par les rebelles dans la Vendée
Ode alcaïca, quae primum & unicum praemium retulit, in decoram mortem pueri Barrae, vix nati tredecim annos, & in loco qui dicitur Vendée, a rebellibus turpiter mactati
Texte
Praeclara gestis Francia grandibus !
Grande par des exploits éternisant ta gloire,
Laetare… Proles en tibi germinat,
Livre-toi, France heureuse ! À des transports joyeux ;
Virtute magna fulgurantes
Déjà de tes enfans, instruits à la victoire,
Progeneras tibi met triumphos.
Par-tout tu vois germer les efforts généreux.
Testis decorus tu, puer, emicas,
De ce sublime élan tu devins le modèle,
O Barra felix ! Pectore Martio
Illustre et cher Barra !… Tes jours à peine éclos
Qui natus heors,praetulisti
Marquèrent ton courage ; & l'ardeur de ton zèle
Pro patria fera fata vitae.
Te fit, pour la patrie, expirer en héros.
Ibas ...Stupentem te simul ambiunt
Tu marchais… de brigands une troupe effrénée
Hostes minaci terribiles globo ;
Vient, à tes yeux surpris, présenter la Terreur ;
Spendentque deprenso salutem,
« Fais des vœux pour les rois : ta vie est assurée…
Si voveat tua vos tyrannos.
Sinon, (poursuivent-ils) tremble, et vois ton malheur. »
Nescis profano gutture pollui ;
Ton cœur ne connaît point ce vœu lâche, incivique ;
Civem vocas te tunc quoque Gallicum,
Tu t'honores du nom de citoyen français,
Laetus clamas : « Sit beata
Et dis avec transport : « Vive la République !
Publica res, vigeatque semper ! »
Périssent les tyrans, ainsi que leurs forfaits ! »
Urit nefandos ira satellites ;
À ce mot, des brigands la fureur est ardente ;
Suadere cessant… telaque barbare
Ils cessent d'exhorter… & tous, en présentant
Arrecta circum proferentes :
Du glaive meurtrier la pointe étincelante :
Ni voveas, cadis ecce, clamant.
« Obéis, disent-ils, ou tu meurs à l'instant ! »
« Cadam libenter… nec sit, ait, pudor
« Je mourrai volontiers ; ne craignez point, barbares !
Se sponte dantem caedere victimam !
Mon cœur, vous le voyez, se présente à vos coups ;
Tu fausta vivas !… & triumphus,
Toi, France ! Sois heureuse… et, malgré ces Tartares,
Publica res, tibi sit perennis ! »
Mourir pour toi, sera mon plaisir le plus doux. »
Haec dum sereno lumine praedicat,
En prononçant ce vœu, que sa grande âme inspire,
Frendens in unum tota cohors ruit…
Ces monstres rugissans, et tous ensemble unis,
Armis trucidant… & necati
Fondent sur cet enfant… Il succombe, il expire…
Corpus iners lacerant atroces.
Les tigres, même alors, ne sont point assouvis !
At non cadendo totus abis, puer !
Mais la mort ne saurait te couvrir de ses ombres,
Heroa stratum se cito nobili
Aimable et digne enfant !… Couronnant tes travaux,
Palma coronans, orbe vasto
La déesse aux Cent-Voix perce les voiles sombres,
Fama tuas canit ecce laudes.
Et court à l'univers annoncer le héros.
Fletus acerbos & gemitum gravem
Tu parus, France ! Alors regretter son jeune âge,
Visa tu primum, Gallia, fundere !…
Et des pleurs maternels coulèrent de tes yeux !…
Magna mox mirans facta nati,
Mais bientôt admirant de ton fils le courage,
Hujus ovas decorate manes.
Ton soin fut d'honorer ses mânes précieux.
In aede sacra, qua patriae viros
Dans cet auguste temple[1], où la main de la gloire
Alte locavit gloria martyres,
Des hommes immortels grave les noms sacrés,
Hic te triumpho laureatum
Le laurier, sur ton front posé par la victoire,
Clare puer, vaga saecla cernent.
T'indiquera sans cesse aux siècles étonnés.
Hic tu juventae splendida proferens
Là, servant de leçon, d'exemple à la jeunesse,
Exempla, monstras pectore in arduo
Tu montres ce que peut la vertu dans les cœurs,
Quid saepe possit mira virtus ;
Quand surtout la patrie, aux mœurs, à la sagesse,
Et patriae generosus ardor.
Unit de son amour les sublimes ardeurs.
At vos, pudendo foedere quos rapit
Mais vous, que les tyrans et leur ligue exécrable
Atrox tyrannis bella per impia,
Entraînent contre nous à d'injustes combats,
Horrete !… Junctos una sternet
Tremblez !… Le Français seul, de sa main redoutable,
Gallica gens, pia stirps virorum.
Saura, vous foudroyant, punir vos attentats.
Vix natus heros talia si queat,
Si ce héros naissant laissa de tels vestiges,
Quid vasta moles totaque civium,
Que fera tout un peuple, ardent à triompher,
Quos sensus inflammans honoris,
Quand l'honneur qui l'enflamme, enfantant des prodiges,
Non patitur subigi leones ?
En a fait un lion que rien ne peut dompter ?
- ^ Le Panthéon