Une respectable hirondelle,
Grande voyageuse, et fidèle
À revenir dès le printemps
Visiter amis et parents,
Disait à maints oiseaux rassemblés auprès d'elle :
Je ne reconnais plus les gens,
Soit à la ville, soit aux champs ;
Comme tout a changé ! Quel ennui ! Quel silence !
Jadis dans ces lieux ravissants,
Tout respirait l'amour, la gaîté, l'abondance :
Je n'entends plus, hélas ! Que des gémissements.
Vous souvient-il, mes chers enfants,
Qu'au retour de mes longs voyages,
Je vous faisais toujours quelques contes charmants ?
J'y joignais le conseil d'être sensibles, sages,
De chérir famille et voisins,
De respecter et leurs nids et leurs grains :
Puis je citais des traits de constance en ménage.
Chacun de vous par cœur apprenait mon récit,
Le répétait, en tirait du profit ;
Mais depuis bien longtemps on se tait au bocage.
Mes leçons, chers amis, n'ont-elles plus d'attraits ?
Les bons et doux oiseaux sont devenus muets,
Ou n'osent plus répondre à mon langage ;
Et qui pis est, je vois qu'à mes touchants discours
Tous les méchants deviennent sourds.