Volière et les oiseaux (La)
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Mots-clés
Musique
Paratexte
Texte
Laissons dire Platon, disserter Épicure,
Et le lycée athénien
S'étendre en beaux discours sur l'essence du bien.
Il n'en est qu'un réel, que nous fit la Nature,
La liberté : sans elle, ici bas tout n'est rien.
L'homme enchaîné gémit, l'homme gêné murmure ;
Tous les goûts, tous les vœux pour elle sont égaux :
Lecteur, pour en avoir la preuve la plus sûre,
Consultons sur ce point l'instinct des animaux.
Des oiseaux différents de goûts, de caractère,
Habitaient en commun une large volière :
L'un aimait le repos, l'autre le mouvement ;
L'un de ses sons plaintifs attristait le village :
L'autre en faisait la joie avec l'amusement
Par les doux sons de son ramage.
Si l'un chantait le jour, l'autre chantait la nuit ;
C'était à qui d'eux tous, dans ce rare assemblage,
Ferait plus de tapage,
Et pourrait mieux troubler son voisin par le bruit.
Tous même, en fait de nourriture,
Différaient encor plus : l'un s'abecquait de grain,
L'autre de vermisseaux voulait chère qui dure ;
Jamais deux, comme on dit, n'allaient un même train.
Un point seul réunit le discordant ménage.
Lise un jour oublia de leur fermer la cage.
Chacun d'eux alors de concert,
Saisissant à son gré l'occasion offerte,
Enfile la porte entre-ouverte,
Et libre désormais fend les plaines de l'air.
Quiconque lit ces vers, dit à part soi, je gage :
Des Français de nos jours ces oiseaux sont l'image.