Ode latine au général Bonaparte
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Musique
Paratexte
Ce n'est pas seulement en France et en Italie que le nom de Bonaparte est cher aux amis de la liberté. Nous avons reçu de Hollande cet hommage qui lui a été rendu par un savant d'Amsterdam, pays où l'on cultive encore la langue des Romains, tandis qu'on la laisse tomber en France dans une honteuse désuétude. Nous nous empressons de publier cette pièce intéressante. L'auteur est M. de Bosch, connu dans la littérature par une fort belle édition de l'Anthologie, avec la version inédite de Grotius. Nous joignons au texte latin de son ode, une traduction française faite à la hâte, mais suffisante pour en faire connaître au moins l'esprit, à ceux de nos lecteurs à qui la langue latine n'est pas familière. Les latinistes nous pardonneront ce qu'a de faible cette imitation, d'autant plus volontiers qu'elle leur est inutile. Nous voudrions qu'elle le fût à tous les Français.
Texte
Ad Bonaparte | À Bonaparte |
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Ad Bonaparte Qua lingua vatum, linguave civium Quo bella tentas, gloria convolat, Sit magna virtus, pellere finibus Qualis sub altis condita nubibus Qualiave miltis nauta laboribus, Sic te sereno pectore Galliae, Conjux amato reddita conjugi, Mater peremtum credula filiunt, Quocunque flectis lumen amabile Proles honestis orta parentibus Stravere multi militiae duces Trux Hannibal, portas dera Romuli Non delicatis sensibus obrutus, Accedis alta maenia Mantuae, Doctus sagittas tendere Noricas, Sed quid periti prompta ducis manus, Non contumaces pertulit impetus, Dum victor audis, pulvere sordidus Divina talis gloria Palladis Quo castra ponis, quoque moves loco, Sedes superbas, quas Athesis rigat, Nunc bellicosae flectis ad Austriae, Armis recessit mox ubi Gratium, Patrocli ademti funera vindicans Sic te, remotis reddere gentibus Ast illa, verae splendor adoreae, Hac te decorum cum videt Anglia, Sic pax resurgat, cinctaque spiceis Non ulla saevae verba licentia, Sed nos quotannis, te duce sospites, |
Quels poètes ou quels citoyens pourront honorer tes combats de louanges assez éloquentes, pour ront , ô Bonaparte ! Transmettre tes triomphes aux siècles à venir ? Partout où tu portes la guerre, la gloire vole avec toi, la terreur saisit les phalanges ennemies : leurs cohortes croient voir étinceler ta chevelure de flammes qui les frappent d'effroi. Ou tel qu'après de longs travaux un pilote échappé aux flots hérissés des mers, et aux menaces de l'aquilon en fureur, salue enfin la terre de sa patrie ; Tels, oubliant leurs peines, le peuple des Gaules et les nobles descendans de l'antique Ilium, les habitans du Rhin et ceux qui boivent les eaux de la Muër te célèbrent, en déposant leurs armes. L'épouse rendue à son époux bien aimé, celle qui met tout son bonheur dans les nœuds qui lui sont promis, célèbrent en toi leur libérateur, et se précipitent dans tes bras. La mère qui croyait avoir perdu son fils, le voyant accourir sain et sauf, pleine de reconnaissance, vient placer sur ta tête un lierre immortel. Quelque part que tu fixes tes aimables regards, leur grâce paisible captive tous ceux qui t'approchent : ainsi la faveur publique suivait à Rome les Scipions et les Décius. Les enfans nés de parens honnêtes, t'offrent des prix dignes de toi : et ceux qui balbutient encore s'essaient, pleins de joie, à chanter ingénuement tes louanges. Plusieurs chefs de cohortes guerrières ont renversé des cités enceintes de vastes murailles : il en est peu qui aient obtenu la solide gloire de ramener par la guerre les douceurs de la paix. Tu n'es point ainsi dominé par la faiblesse de tes sens. Tu regardes avec mépris et le sommet des Alpes, et tous les attraits qu'étale la volupté dans la retraite de Capoue. Tu t'approches des murs de l'altière Mantoue, que le Mincio environne avec bruit de ses ondes sinueuses, et ses rives retentissent du murmure des roseaux dont elles sont couvertes. Habile à lancer les flèches d'Illyrie, un général plein de valeur et de sagesse, digne d'être célébré par les chants des poëtes, commande les cohortes qui défendent la ville. Mais que peut le bras intrépide d'un chef expérimenté ; que pourraient ô Bonaparte ! les explosions brûlantes des instrumens de la mort contre les traits lancés par ta main puissante ? Mantoue n'a pu résister à l'impétuosité constante, aux coups réitérés des Français ; et le camp qui la défendait étant tombé en ton pouvoir, lasse enfin de tant d'efforts, elle a succombé sous tes trophées. Ainsi la gloire de la divine Pallas, couvrit d'honneur une lyre harmonieuse, lorsqu'Alexandre épargna la famille et la maison du chantre thébain. Partout où tu places ton camp ; où tu diriges ta marche, tes combats ont d'heureux succès ; et les lauriers de la victoire ombragent tes drapeaux d'un feuillage immortel. Tu vois soumis à tes armes et les murs superbes que l'Adige arrose, et ceux qu'environne le Pô, et ceux que battent les flots des deux mers…
Pour venger la mort de Patrocle, le fils de Pélée ne craignit ni les vagues irritées du Scamandre, ni les flots du rapide Simoïs.
Elle en a seule le pouvoir, cette palme qui n'est point ensanglantée, symbole éclatant de la véritable gloire, qui enchaîne les cœurs désunis, et qui s'enorgueillit déjà de ses feuilles nouvelles. Qu'ainsi la paix puisse renaître, que le front ceint d'épis et de feuillages, elle rende à l'univers tout son éclat : qu'elle visite les temples de Minerve et les autels du dieu des Arts. Mais nous, que ta valeur a sauvés, nous viendrons tous les ans, ô Bonaparte ! verser en ton honneur, à pleine coupe, la liqueur des vignes de la Moselle. |