Petit Nantais (Le)
Auteur(s)
Texte
Musique de Méhul
Sur ce rivage solitaire,
Ô mon enfant ! Tu viens exhaler ta douleur !
Ah ! Fais-moi le dépositaire
Des maux qui déchirent ton cœur.
– J'aimais papa plus que moi-même,
Des barbares l'ont fait périr :
Hélas ! Dans mon malheur extrême
Il ne me reste qu'à mourir.
– Écoute l'ombre de ton père,
Elle te dit : Mon fils, calme ton désespoir !
En vivant, console ta mère,
D'un bon fils c'est là le devoir.
– Maman ! Ô souvenir funeste !
Dans les flots elle a dû périr ;
Elle n'est plus… l ne me reste
Que l'espérance de mourir.
– Viens habiter dans ma chaumière ;
Infortuné, je dois veiller sur tes destins.
Suis mes pas ! Il faut te soustraire
À la rage des assassins.
– Bon vieillard, dans mon infortune,
Tu veux en vain me secourir ;
La lumière m'est importune :
Laisse-moi, laisse-moi mourir !
– Ne différons pas davantage ;
Ô mon enfant, fuyons ! Ne m'abandonne pas.
Un assassin, vers ce rivage
En courant dirige ses pas.
– Qu'il vienne, ma joie est extrême :
Adieu, vieillard ! Je vais périr.
Ah ! Quand on perd tout ce qu'on aime,
C'est un bonheur que de mourir.
– Voilà, d'une race perfide,
Un rejeton proscrit, dit le lâche assassin ;
Et tirant l'épée homicide,
De l'enfant il cherche le sein.
– Vois cet enfant ! Ta main barbare
Peut-elle le faire périr ?
Ah ! S'il faut que l'on m'en sépare,
Avec lui fais-moi donc mourir !
– Ton attente sera remplie,
Dit le monstre, et sitôt que noyé dans son sang,
Il voit l'enfant tomber sans vie,
Du vieillard il perce le flanc.
Vil scélérat, je te pardonne,
Dit le vieillard prêt à périr ;
Le trépas n'a rien qui m'étonne,
Cet enfant m'apprit à mourir.