Réponse aux « Incrédules »

Auteur(s)

Année de composition

1793

Genre poétique

Description

Dizains d'octosyllabes

Paratexte

Extrait des cantiques des missionnaires

Texte

Insensés ! Qui du bras céleste
Ne craignez plus le châtiment,
Et qui, dans un calme funeste,
Vous livrez au dérèglement,
En vain, affermis dans le vice,
Vous vous cachez le précipice
Que vous creuse l'impiété ;
Dieu va combler votre misère ;
C'est du trésor de sa colère
Que sort votre incrédulité.

Parvenus à l'orgueil suprême
Où s'élève le libertin,
Vous vous faites un faux système
De la Nature et du destin.
Rien ne fixe plus vos pensées ;
Des erreurs les plus insensées
Vous sucez le fatal poison :
Rebelles au joug de la grâce,
Il ne manquait à votre audace
Que d'éteindre encor la raison.

Concevez-vous que ce génie,
Cet esprit par vous méprisé,
Ne soit que la simple harmonie,
De votre corps organisé ?
Quoi ! Cet intelligent ouvrage,
De l'Éternel la vive image,
Dans le néant serait réduit !
Ce qu'il paraît n'est qu'un vain songe :
Est-ce donc que par le mensonge
Dieu nous abuse et nous séduit ?

Sourds à la voix de la Nature,
Monstres dans la société,
Que coûte à votre cœur parjure
La plus noire infidélité ?
Si tout périt avec la vie,
Quel droit est sacré pour l'impie ?
Il n'est plus ni vertu ni foi ;
Tout est permis et légitime ;
Il ne lui reste pour maxime
Que de tout rapporter à soi.

Dans tous les lieux, dans tous les âges
L'amour de l'immortalité
Laisse d'éclatans témoignages
D'un sentiment si respecté.
Présumez-vous pouvoir détruire
Une loi qui sut nous instruire
Dès que le monde a commencé ?
Et ce qu'ont cru les plus habiles,
Des aveugles, des indociles
Croiront-ils l'avoir effacé ?

Osez mettre dans la balance
Des témoignages si constans :
Douterez-vous d'une existence
Qui n'a d'ennemis que vos sens ?
Mais quoi ! L'éternelle sagesse
Vous laisse endormis dans l'ivresse
Où le vice vous a plongés.
Comment surmonter ces obstacles ?
Vous méprisez les saints oracles ;
Par vos mépris ils sont vengés.

Ciel ! Quelle horrible destinée
Suit bientôt le profond sommeil,
Quand sur une âme abandonnée
Tu ne luis plus, divin soleil !
Fais qu'à la voix de ton tonnerre
Tremblent les peuples de la terre,
Je serai moins épouvanté.
Lance-nous ces traits invisibles
Qui, dans nos âmes insensibles,
Font triompher la vérité.