Romance faite par le citoyen Lombard, instituteur républicain, en sortant de Paris, le 7 fructidor, an V pour se soustraire à la poursuite des réacteurs

Auteur(s)

Année de composition

1797

Genre poétique

Description

Huitains d'octosyllabes en rimes embrassées avec refrain

Texte

Tu ne fus donc pour nous qu'un songe,
Ô douce et chère Liberté !
Nous rentrons en captivité,
La trahison nous y replonge…
Ô mort, viens abréger mes jours :
Je ne puis plus souffrir la vie ;
Eh ! La noire mélancolie
En empoisonnerait le cours,
Tu ne fus donc, etc.

France, qu'enrichit la Nature,
Que partout l'art sait embellir,
Tout homme libre va te fuir…
Il va fuir un peuple parjure.
Cité, dont on corrompt les mœurs,
S'il s'éloigne de ton enceinte,
C'est par prudence, et non par crainte ;
C'est qu'il tous tes malheurs…
Tu ne fus donc, etc.

En vain, Français, couvert de gloire,
Tu vainquis aigle et léopards ;
En vain sous tes fiers étendards
Tu fixas toujours la victoire ;
Tant de travaux, tant de succès
Seront perdus pour la patrie :
Elle est près d'être anéantie
À la honte du nom français.
Tu ne fus donc, etc.

Oui, je frémis à la pensée
Des maux jusqu'alors inouïs,
Qui doivent fondre sur Paris
Et dont la France est menacée !
Tout mon sang se glace d'effroi,
En voyant l'horrible sicaire
Massacrer son ami, son père,
Pour un monstre qui se dit roi.
Tu ne fus donc, etc.

Peuple abusé, dans ton ivresse,
Tu méconnais tes vrais amis ;
Tu livres à tes ennemis
Cette Liberté qui les blesse…
Le bonheur, qui te tend les bras,
Tu le fuis, ou tu le repousses :
Dupe aussi des grandes secousses,
En vain tu les regretteras !
Tu ne fus donc, etc.

Je verrais ta tête avilie
Se courber sous un joug affreux !
Renonçant au droit d'être heureux
Tu servirais la tyrannie !…
Non, non, reviens de ton erreur ;
Et si ton intérêt te touche
Poursuis le despote farouche
Qui ne cherche que ton malheur.
Ne sois donc plus pour nous un songe,
Ô douce et chère Liberté ;
Loin de nous la captivité…
Jamais qu'on ne nous y replonge !

Ô toi, qui créas tous les êtres,
Toi, qui soutiens cet Univers,
Anéantis les cœurs pervers
Qui veulent des tyrans pour maîtres.
Il n'est d'autre maître que toi…
Fais que leurs armes homicides,
Que leurs projets liberticides
Disparaissent devant la loi !
Ne sois donc plus, etc.

Et vous héros de l'Italie,
Du Nord, de Moselle et du Rhin,
Soumis à votre souverain
Confondez celui d'Idalie…
Enflammés de zèle et d'amour
Accourrez, guerriers magnanimes.
Punir l'audace et tous les crimes
C'est pour vous l'affaire d'un jour…
Ne sois donc plus, etc.

 
 

Sources

BNF, 8 Ye 5222.