Stances irrégulières pour l'inauguration de Marat et de Lepelletier
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Amis, vous couronnez de fleurs
Des Gracques de nos jours les funèbres images :
Le peuple sur leur tombe a répandu des pleurs,
Du cœur vrais et touchants hommages.
Par un même zèle emporté,
Moi, je viens honorer d'un chant patriotique
Ces martyrs de la République,
Ces héros de la Liberté.
Longtemps l'Église a fabriqué des saints
Trop honorés de l'Europe avilie :
Que désormais les saints de la patrie
Soient de fameux républicains !
Loin ces hochets de la moderne Rome !
De héros seuls peuplons les cieux ;
La liberté, l'honneur seront nos dieux,
Et le saint sera le grand homme.
Denis, le patron de la France
Et de cette auguste cité,
De nos vieux rois protégeait l'insolence,
À l'ombre de la sainteté,
Croissait des fleurs de lis la tige monarchique.
De Marat l'esprit prophétique,
Semblable à la divinité,
Assurera l'éternité
À l'arbre de la République.
Marat, Lepelletier, tous d'eux sont immortels ;
Honorons, chérissons leur mémoire civique :
À leurs mâles vertus élevons des autels,
Et rendons à leur cendre un culte politique.
Demi-dieux de la République,
Saints amis de l'égalité,
Ils ont vécu pour la chose publique,
Et sont morts pour la liberté.
Consolez-vous, mânes sanglants,
La France par des rois ne peut être asservie ;
Le crime affreux qui vous ôte la vie
Nous inspire la soif du sang de nos tyrans.
Populaires héros, la nation vous range
Parmi les plus grands des humains ;
Les traîtres ne sont plus, et l'échafaud vous venge
Du fer impur des assassins.
Compagnons qui portez des cœurs libres et francs,
Ennemis de la tyrannie,
Du républicanisme intrépides enfants,
Que sur l'autel de la patrie
Fume pour eux un pur encens !
Sanctifions ici nos terribles serments ;
Et jurons d'une voix hardie,
La liberté du peuple et la mort des tyrans.