Strophes à la paix, à l'occasion du traité de Lunéville, conclu entre le Premier Consul de la République française, et l'empereur d'Allemagne, roi de Hongrie et de Bohême
Auteur(s)
Année de composition
1801Genre poétique
Description
Mots-clés
Paratexte
An VIII
Texte
Ô toi dont les mortels, dans un heureux délire,
Ont élevé le trône aux cieux ;
Qui tiens les nations sous ton aimable empire,
Par des liens délicieux.
Ô paix ! L'humanité contemple
Tes autels si long-temps déserts,
Elle appelle au sein de ton temple
Tous les peuples de l'univers.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Ce qu'aux divers climats la Nature dispense,
Par toi devient un bien commun :
Le commerce bravant des ondes l'inconstance,
De mille peuples n'en fait qu'un :
De la florissante industrie
Tu couronnes le noble effort :
Des guerres fuyant la furie,
Les arts en toi trouvent un port.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Rois ! Qu'un trompeur espoir trop long-temps sut séduire
C'est l'éternelle vérité
Qui, par l'expérience, a voulu vous instruire
De ce que peut la liberté.
Pour donner des fers à la Grèce,
Xerxès passe en vain l'Hellespont ;
Et Coclès, que le Toscan presse,
Du Tibre défend seul le pont.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Vous franchirez des temps l'abîme immense et sombre,
Beaux jours des Grecs et des Romains !
Cent royaumes puissans n'ont laissé qu'un vain nombre
Dans la mémoire des humains.
Devant votre antique vaillance,
Le temps arrête ses progrès ;
Tes destins, glorieuse France !
Aux leurs s'uniront désormais.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Quand ton mâle courage, aux nations vengées
Proclamait leurs droits avilis,
Tu vis s'armer vingt rois… Des hordes conjurées
Inondaient tes champs envahis…
Soudain l'Escaut, les Pyrénées,
Le Rhin fléchissent sous tes lois ;
Du Pô, les rives étonnées
Répètent tes plus beaux exploits.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Des rivages de l'Inde, aux ondes atlantiques,
Lorsque ton nom retentissait ;
Quand le Scythe songeant à ses exploits antiques,
À la gloire s'intéressait ;
Pour anéantir tes armées,
Le Nord vomit d'autres soldats ;
Leurs bandes, à vaincre formées,
Cèdent à l'effort de ton bras.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Sous l'aigle impérieuse un cruel vainqueur plie
Le Génois, après le Lombard…
Mais quel torrent franchit, pour venger l'Italie,
Le front glacé du Saint-Bernard ?
Marengo ! Ton cri de victoire,
D'Ochstet prépare le succès ;
Nos braves, au fort de leur gloire,
S'arrêtent au seul nom de paix.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Quel démon corrupteur, des bords de la Tamise,
Dans Vienne a soufflé ses fureurs ?
Il rallume la guerre, et l'Europe surprise
Voit renaître encor ses horreurs :
L'art rassemble en vain ses miracles ;
La France commande la paix ;
À sa voix il n'est point d'obstacles
Pour le Germanicus français.
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !
Tout cède, ô Bonaparte ! à ton heureux génie,
Rival du plus grand des Césars ;
Au suprême pouvoir, au temple d'Uranie,
Habile comme au Champ-de-Mars :
Posant la foudre meurtrière,
Reçois, sage triomphateur,
De l'aveu de la terre entière,
Le nom de pacificateur !
Célébrez, peuples de la terre,
Par votre union ce grand jour !
Bannissez à jamais la guerre,
Chantez de la paix le retour !